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résultat négatif de ses efforts. Que faire ? M. Asquith s’est de nouveau attaché à la loi comme à la seule planche de salut qui lui restât ; il a demandé à la Chambre de la voter. Les socialistes ont répondu qu’ils la repousseraient. Alors s’est passée une volte-face imprévue, mais cependant très explicable, du parti conservateur : il a annoncé qu’il voterait la loi. Son nouveau chef, M. Bonar Law, a déclaré que, « le bill ayant reçu l’approbation de la majorité de la Chambre, il ne voulait pas faire obstacle à ce que celle-ci avait estimé être le seul moyen de parer aux nécessités de l’heure présente. » Et, finalement, le bill a été voté par 213 voix contre 18. Il était deux heures du matin : le bill a été transmis à trois heures à la Chambre des Lords qui l’a voté aussitôt en première lecture et qui le votera définitivement sans difficulté. Ainsi l’opposition désarme devant la gravité angoissante de la situation. Le gouvernement a pris une responsabilité ; l’opposition unioniste la lui laisse. Elle ne veut, ni dans l’une, ni dans l’autre des deux Chambres, encourir le reproche d’avoir précipité les catastrophes que l’Angleterre redoute. Le gouvernement a déposé une loi qui, à l’entendre, est de nature à les prévenir : soit ! Lord Lansdowne a déclaré qu’il ne voyait pas dans cette loi un acte législatif ordinaire, mais un acte du pouvoir exécutif destiné à pourvoir à un péril imminent’. Il a conseillé à ses amis de ne pas y faire obstacle.

Jusqu’ici, ce qui ressort avec évidence des incidens de ces derniers jours est l’inefficacité des interventions gouvernementales dans les conflits du capital et du travail. M. Asquith a échoué, échoué toujours. Alors il a provoqué l’intervention parlementaire, mais sera-t-elle plus heureuse, et que feront les ouvriers demain en présence d’une loi qui leur marchande et leur mesure les satisfactions qu’ils exigent ?

Nul n’en sait rien. Cependant une lueur d’espérance est venue montrer la situation sous une forme moins sombre. La Fédération ouvrière a résolu de soumettre aux intéressés, par voie de référendum, la question de savoir s’ils étaient d’avis de continuer la grève ou de la clore. Si les ouvriers votent librement, il y a lieu de croire que, après les souffrances qu’ils ont déjà subies, ils opteront pour la reprise du travail, qui aurait lieu alors aussitôt après Pâques. S’il en est ainsi, le cauchemar qui pèse sur l’Angleterre sera dissipé au moins pour quelque temps.


Chez nous, la Chambre des députés a clos enfin la discussion de l’interpellation sur la politique extérieure, et elle continue de plus en plus laborieusement celle de la réforme électorale. Elle discute aussi