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képi au bout de leur épée et crient : En avant ! Et le mot est à peine terminé que nos troupes, ne perdant pas leur temps à tirailler, se précipitent baïonnette au boni du fusil, au pas de course comme un tourbillon qui renverse, emporte tout ce qu’il rencontre devant lui. Les Prussiens déconcertés ne tiennent pas contre le choc ; ils plient, rompent, fuient malgré les coups de pied et les coups de sabre dont leurs officiers les accablent pour les arrêter. Des hauteurs où ils étaient parvenus, ils dégringolent vers la Sauer, puis dans Wœrth. Là ils se reprennent : embusqués dans les maisons, les jardins, les fossés, les haies de la route de Haguenau, ils immobilisent d’abord ceux qui les poursuivent, puis, dès que des troupes fraîches les ont rejoints, deviennent assaillans, obligent à reculer nos troupes fatiguées de leurs avantages et se réinstallent dans les positions perdues. Mac Mahon leur envoie de nouveaux assaillans, qui, comme les précédens, repoussent d’abord, poursuivent, et sont ensuite à leur tour repoussés et poursuivis. C’est le sort des deux brigades de la division Conseil-Dumesnil, qui perd ses deux chefs, le colonel Champion, et le général Maire ; c’est le sort de la brigade L’Hérillier (division Raoult) dont le général est blessé ainsi que ses aides de camp. La division Conseil-Dumesnil disparaît enfin du combat comme l’avait fait la division Lartigue ; la brigade L’Hérillier se retire en désordre vers Elsasshausen.

Raoult, déjà serré de près par Kirchbach, va encore avoir sur ses bras les Bavarois. Ils se sont fait beaucoup prier avant d’entrer en ligne, et le Prince royal a été obligé de leur envoyer quatre officiers. Ils s’étaient décidés enfin à établir trois batteries vers Gœrsdorff, prolongeant la formidable ligne de l’artillerie allemande ; de là ils jetaient des obus et allumaient des incendies à Frœschwiller. Leur division Stephan avait passé la Sauer (2 heures) sur le pont d’Alte Mühle et sur un autre improvisé avec des arbres, traversé en courant les mamelons boisés et les prairies basses qui séparent les deux cours d’eau, abordé le versant oriental des hauteurs de Frœschwiller par le chemin d’Alte Mühle. Raoult leur oppose le 2e tirailleurs de la brigade Lefebvre, commandant Suzzoni, soutenu par une batterie de mitrailleuses. Mais il ne servait de rien d’en coucher par terre ; d’autres survenaient toujours. Une nouvelle brigade bavaroise apparaît. Les turcos, sous les obus des batteries de Gœrsdorff