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LE MARQUIS. — Est-ce que la promenade ne vous semble pas belle ?

LE CHEVALIER. — Comment, la promenade ?

LE MARQUIS. — Oui, il est vrai qu’il n’y fait pas beaucoup d’air.

LE CHEVALIER. — Pourquoi de l’air ici ? Toutes les fenêtres sont fermées.

LE MARQUIS. — Qu’est-ce que vous parlez de fenêtres dans un jardin ?

LE CHEVALIER. — Nous sommes dans un jardin ?

LE MARQUIS. — Mais... C’est que je croyais... Bon ! (Il regarde autour de lui.) Vous me distrayez aussi.

LE CHEVALIER. — Vous n’en avez pas besoin, je vous assure ; mais pourvu que vous m’écoutiez, soit ici, soit ailleurs, c’est égal.

LE MARQUIS. — Si vous avez à me parler, il faut le dire.

LE CHEVALIER. — Je vous l’ai déjà dit, vous m’avez répondu : Eli bien ! allons aux Tuileries, nous causerons plus facilement.

LE MARQUIS. — C’est vrai. J’aurai changé d’idée en chemin. Mais voyons à présent, je ne perds pas de vue mon projet.

LE CHEVALIER. — Si vous avez un projet différent du mien et qu’il soit meilleur, j’en profiterai avec grand plaisir. Voyons, je vous écoute.

LE MARQUIS. — Si vous le savez, il est inutile de vous le redire, mais je ne vois pas de meilleur parti à prendre dans ce cas-là que le mariage.

LE CHEVALIER. — Comment ! le mariage ? au lieu d’une compagnie de cavalerie.

LE MARQUIS. — Je ne veux pas de compagnie de cavalerie.

LE CHEVALIER. — Pourquoi donc ?

LE MARQUIS. — Mais songez que je suis officier général.

LE CHEVALIER. — Ce n’est pas pour vous... c’est pour moi.

LE MARQUIS. — Vous voulez avoir une compagnie de cavalerie ?

LE CHEVALIER. — J’ai déjà eu l’honneur de vous en parler plusieurs fois.

LE MARQUIS. — Oui, oui, je me rappelle.

LE CHEVALIER. — Si vous voulez me faire avoir la promesse de la première qui viendra à vaquer, mon argent est tout prêt, mais il faut en parler sans perdre de temps.

LE MARQUIS. — Je ne suis venu ici que pour cela.

LE CHEVALIER. — Réellement ?

LE MARQUIS. — Oui, et si la comtesse y consent, ce sera une affaire bientôt finie.

LE CHEVALIER. — Est-ce qu’elle connaît quelque capitaine qui veuille quitter ?

LE MARQUIS. — Quoi quitter ?

LE CHEVALIER. — Le service.

LE MARQUIS. — Ah ! vous parlez toujours de votre compagnie ?

LE CHEVALIER. — Eh ! oui, vraiment.

LE MARQUIS. — C’est que je confondais.

LE CHEVALIER. — Vous me promettez de suivre cette allaire ?

LE MARQUIS. — Je vous en réponds.

LE CHEVALIER. — Il faut solliciter vivement.

LE MARQUIS. — Ne vous mettez pas en peine. Je sais comme il faut s’y