Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 9.djvu/192

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’impôt sur le revenu ; sa déclaration avait été acceptée sans observation par les autorités, qui avaient encaissé chaque année la somme considérable qu’il leur verse. Or, on vient de lui annoncer que, pour la seule année 1902, il lui sera réclamé un versement quintuple de celui qu’il a effectué, et on lui laisse entendre qu’on en exigera davantage pour les antres. Le contribuable, nous allions dire l’inculpé, ne pourrait se défendre qu’en produisant ses livres, mais cette publicité lui serait néfaste vis-à-vis de ses rivaux, dont un représentant siège dans la commission de taxation et serait ainsi mis au courant de ses affaires. Il est dans une impasse. Un autre, dont les déclarations ont paru insuffisantes, a été l’objet d’une enquête policière dont voici un échantillon. Le président de la Commission de taxation a écrit à l’un des concurrens du personnage visé i toutes les voies sont permises au fisc : « Nous avons tout lieu de croire ses bénéfices supérieurs à ceux qu’il avoue : l’année dernière, il a fait, à l’occasion des quatre-vingts ans de l’Empereur, une donation à des œuvres d’utilité publique. Etant donné son avarice notoire, nous jugeons qu’il n’a certainement pas consacré à cette donation plus de la moitié de son revenu annuel. » Après ce bijou d’inquisition fiscale, il n’y a qu’à tirer l’échelle.

Il ne s’agit pas seulement des impôts qui atteignent directement les individus ou les sociétés. L’assiette et la nature des impôts indirects, de ceux qui frappent les objets de consommation, ont une importance au moins égale dans la vie économique des nations. Comparez celles chez qui les denrées alimentaires sont exemptes de tout droit et arrivent par conséquent sur la table de l’habitant sans avoir acquitté aucune taxe, avec les autres, où la douane majore parfois de moitié le prix de la matière première ou de l’objet d’alimentation : il est aisé de comprendre de quel côté est la supériorité. Il est vrai qu’il faut aussi considérer la force productive du sol, et que le fait qu’un peuple tire de.sa propre agriculture ce dont il a besoin pour vivre le met dans une situation favorable.

Un point à examiner avec soin est ce que nous appellerons les réserves d’impôts. On ne doit pas se borner, lorsqu’on étudie un système fiscal, à constater le nombre de millions qu’il fournit : on analysera les sources des revenus publics, de façon à voir ce qui n’est pas encore atteint par le percepteur, à évaluer la mesure dans laquelle tel ou tel impôt pourrait être majoré