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et doivent leur naissance à la différence de température entre l’Océan échauffé et les régions glacées de la haute atmosphère. Il s’en produit aussi au-dessus du sol : les trombes de chaleur du désert, qui se forment à chaque instant au-dessus d’un sable dont la température atteint parfois 80 degrés, et qui se font sentir jusqu’à un millier de mètres de hauteur, sont dues aux mêmes causes. La variété des terrains, enfin, peut déterminer aussi la formation de courans verticaux : les sols sablonneux, arides, desséchant et échauffant l’air immédiatement au-dessus, surtout quand le soleil donne, engendrent des courans franchement ascendans, tandis que des courans de sens contraire sont produits par les régions humides : forêts, étangs, marécages, etc.

En somme, même par beau temps, l’atmosphère peut être le siège de « bouillons » dont l’observateur non averti ne se doute guère, les vents seuls, par suite de la prédominance de leur composante horizontale, étant sensibles à tous, et dès lors, on s’explique facilement la présence, qu’il y ait du vent ou non, de ces remous, de ces vagues d’air, de proportions souvent gigantesques (nous venons d’en donner un exemple), que l’on peut classer, tout comme les vagues de la mer, en lames déferlantes, lames de fond, houle, brisans, etc., dont la rencontre fait vibrer ou trépider nos aéroplanes, quand elle ne les fait pas capoter ou chavirer. Seulement, tandis que les vagues de la mer, d’un lac, d’un fleuve, sont visibles, qu’on peut les voir venir, prévoir leurs effets, chercher à y parer, les remous d’air, eux, malheureusement, sont invisibles : rien ne))eut indiquer sûrement leur existence, leur proximité, les dangers qu’ils peuvent faire courir et, par suite, presque jamais la manœuvre ne peut être préventive. Peu importe, certes, aux grands dirigeables, que leurs dimensions protègent, comme celles des cuirassés sur une mer houleuse et qui n’ont guère à redouter que les brisans que fait naître le voisinage du sol. Mais tout autre est le cas de nos petits aéroplanes, que la moindre vague risque de culbuter et qui, perdus au sein de cet océan en ébullition, ne nous donnent que trop souvent la sensation de « canots à voile gouvernés par des aveugles. » Il y a heureusement toutes raisons d’espérer que cet état de choses ne tardera pas à prendre fin.