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la défense de Paris : Chabaud-Latour et Dejean nous promirent qu’en un mois elle serait en état complet, et Louvet s’engagea à amasser dans le même délai tous les approvisionnemens nécessaires. Quelque rapide que fût la marche de l’ennemi, il nous semblait impossible qu’il fût plus tôt à la porte de la capitale.

Par une intelligente initiative, avant de se rendre au Conseil, Rigault de Genouilly avait télégraphié aux préfets maritimes d’expédier tout de suite les régimens d’infanterie de marine (12 000 hommes), de manière qu’ils arrivassent à Paris le 9 et le 10, d’organiser les équipages en bataillons et de les tenir prêts à marcher ; il avait mandé au préfet de Lorient d’envoyer toutes les batteries d’artillerie et le général Pélissier avec ses 2 000 artilleurs. Nous demandâmes au général Dejean d’appeler également par les moyens les plus rapides les troupes disponibles en Algérie et toutes celles laissées dans le Midi en vue de l’organisation d’une armée à Toulouse : deux régimens de cavalerie de Carcassonne et de Tarbes, tous les régimens d’infanterie de Corse, de Bayonne, de Perpignan et de Pau. Nous le priâmes aussi de préparer, afin de les soumettre au prochain Conseil, l’indication des mesures soit à décréter, soit à demander à la Chambre, de nature à grossir nos effectifs. Tout cela fut voté sans discussion. Il n’y en eut pas davantage sur l’état de siège : nous n’avions à ce sujet qu’à obéir à l’ordre de l’Empereur.

Nous ne fûmes en désaccord que sur la convocation des Chambres. Schneider fit remarquer que l’état de siège allait inquiéter et soulever bien des clameurs, qu’on y verrait l’intention de perpétuer le pouvoir entre nos mains, que le seul moyen de le rendre acceptable était de l’accompagner d’une prompte convocation. Cette supposition d’arrière-pensée égoïste, dans une mesure dont l’initiative venait de l’Empereur, me parut absurde et je répondis avec vivacité à Schneider que la convocation des Chambres rendrait vaine la déclaration de l’état de siège. A quoi servirait d’empêcher les journaux d’exploiter les revers, de conseiller la révolte, de prêcher le mépris de la Constitution, de vilipender l’Empereur, de renseigner l’ennemi, d’agiter les esprits, de semer les défiances et les divisions, si des députés inviolables avaient la faculté de commettre ces infamies dans des discours reproduits par tous les journaux? Contenir la presse