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sculpté. Au même Palais, sur les murs de la salle de bains, ses grandes fresques des Quatre Saisons sont, au point de vue purement pictural, le point culminant de son art, dans ses harmonies les plus fraîches et les plus audacieuses.

Un élève de Pierre de Cortone et du Bernin, Romanelli, présente un intérêt tout particulier pour nous. Français, parce qu’il fut appelé à Paris par le cardinal Mazarin pour décorer son Palais et le Louvre. Là plus qu’à Rome, Romanelli a laissé les chefs-d’œuvre de son art, et sa venue à Paris, qui précéda celle du Bernin, eut dans une certaine mesure la même action pour faire pénétrer en France l’influence de l’art romain au XVIIe siècle.

En France, Simon Vouet, le premier, avait fait renaître la peinture en s’inspirant de l’Italie ; mais l’art qu’il avait appris à Rome et qu’il transporta à Paris, était l’art de l’école bolonaise, cet art fait de pensée et de sentiment religieux, plus que de recherches décoratives. C’est sous cette forme, à la suite de Simon Vouet, que se développe cette école de peinture que l’on pourrait appeler l’école du cardinal de Richelieu et qui compte les noms illustres de Philippe de Champagne, de Le Sueur et de Poussin.

Avec Romanelli, c’est l’art décoratif qui pénètre chez nous, c’est l’art même du Bernin et de Pierre de Cortone. Ses décors des quatre chambres d’Anne d’Autriche au Louvre et surtout celui de la grande galerie du Palais Mazarin sont des œuvres qui, sans égaler les chambres du Palais Pitti, faites par Pierre de Cortone, sont dignes néanmoins d’en être rapprochées. C’est le même art magnifique de décorer des voûtes par des séries de peintures encadrées de décors en relief, le même art d’associer la peinture à la finesse des stucs polychromes. C’est l’art que Lebrun cherchera à imiter dans la galerie d’Apollon au Louvre et dans la Galerie des glaces à Versailles. Mais si l’on regarde l’œuvre de Romanelli, si l’on comprend son charme extraordinaire, la légèreté des encadremens, la délicatesse de la peinture, la finesse des gris, des lilas, des bleutés, des jaunes pâles, de tous ces tons clairs et assourdis qui s’accordent si merveilleusement avec les tons de l’architecture, on verra combien Lebrun s’est mal assimilé un tel art. Sa grande faute a été non seulement de surcharger outre mesure la partie sculptée des encadremens, mais surtout d’employer la peinture à l’huile et par là de se priver de cette fraîcheur que seule donne la peinture à fresque, et qui est le secret de tout le charme des décors italiens.