Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 9.djvu/411

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

commerciale y trouva amplement son compte. Dès le XIIe siècle avant J.-C, ils avaient dépassé les colonnes d’Hercule et fondé le comptoir de Gadès (Cadix) sur la côte méridionale de l’Espagne. Il est vraisemblable que, déjà à cette époque reculée, ils avaient pris pied sur la côte atlantique du Maroc.

Plus tard, Carthage fondée au IXe siècle supplanta les métropoles phéniciennes d’Asie et reprit, pour son propre compte, la politique de pénétration vers l’Occident. Le principal épisode de ce renouveau d’activité phénicienne, c’est le Périple d’Hannon, le premier grand voyage d’exploration de la côte marocaine. Vers la fin du Ve siècle av. J.-C., une expédition considérable partait de Carthage : elle comprenait 60 navires à 50 rames, chargés de 30 000 passagers, hommes et femmes, abondamment pourvus de vivres et de tous les objets indispensables à une longue navigation. Un certain Hannon avait le commandement en chef. La flotte reconnut d’abord la côte méditerranéenne du Maroc, où prospéraient depuis longtemps les vieilles colonies phéniciennes de Rusaddir (Melilla) et de Tingis (Tanger), puis franchit les colonnes d’Hercule et s’engagea dans l’Atlantique. Pour conserver le souvenir de ce voyage sensationnel, les compatriotes d’Hannon en firent graver la relation dans un temple de Carthage. Un voyageur grec, qui passait par là, s’avisa d’en prendre copie, et par lui, le journal de l’expédition, — le plus ancien document de l’histoire marocaine, — est parvenu jusqu’à nous.

Laissons la parole à l’amiral carthaginois : « Après avoir navigué pendant deux jours au delà des colonnes d’Hercule, nous fondâmes une ville qui fut nommée Thymiatérion et qui domine une vaste plaine. Arrivés au cap Soloeis couvert de bois épais, nous y élevâmes un temple à Poséidon. Du cap Soloeis, nous naviguâmes une demi-journée en tirant vers l’Est et nous arrivâmes à un étang voisin de la mer et rempli de grands roseaux. Une multitude d’éléphans et d’autres bêtes sauvages paissaient sur ses bords. Après une journée de navigation au delà de cet étang, nous fondâmes sur la côte Karikon Teikos, Gytté, Akra, Melitta, Arambys. Continuant ensuite notre route, nous arrivâmes au grand fleuve Lixus sur le bord duquel les Lixites faisaient paître leurs troupeaux. Nous y séjournâmes quelque temps et nous conclûmes avec eux un