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voulez prévenir ; nous irions nous-mêmes nous jeter dans le précipice où l’on projette de nous pousser. Evitons tout ce qui a l’air coup d’État. S’il devient nécessaire d’en faire un, nous en discuterons, mais aujourd’hui, c’est inutile. La Gauche ne prépare certainement pas l’invasion et la dispersion du Corps législatif ; elle ne veut que le terroriser, afin d’en obtenir la déchéance et la constitution d’un pouvoir révolutionnaire. Au sens strict du mot, — ses menées ne peuvent être qualifiées d’attentat, mais il n’est pas douteux que ce ne soit un complot contre la sûreté de l’État, et que notre législation le punit aussi bien que l’attentat. Ce complot est flagrant ; les preuves en sont en quelque sorte publiques ; nous mettrons sous la main de la justice, en suivant les formes légales strictes, ceux qui le trament. Ils crieront au coup d’État. Nous répondrons : — Pas coup d’État, coup de justice. — Nous expliquerons cela au public et l’approbation qui accueillera notre exécution sera aussi générale qu’eut été la réprobation contre votre plan.

« Voici donc les modifications que je vous propose : pas d’arrestations cette nuit ; demain matin, à la première heure, nous nous rendrons auprès de l’Impératrice avec Pietri qui est de notre avis, et, sans lui confier notre dessein, nous lui proposerons le rappel de l’Empereur par des raisons exclusivement militaires. Maurice Richard sera de retour de Metz ; il nous fournira des renseignemens précieux. L’approbation de l’Impératrice obtenue, nous demanderons celle du Conseil, sans lui indiquer non plus ce que nous préparons, et nous irons affronter le Corps législatif. Un vote de défiance y sera certainement demandé. Cette motion, vous le croyez, sera repoussée, et la discussion des lois urgentes absorbera la séance. L’Empereur, s’il est parti, comme nous l’en prierons, aussitôt notre dépêche reçue, arrivera à Saint-Cloud aux premières heures de la nuit. Pendant que vous vous rendrez à la Préfecture de police où vous veillerez à l’exécution des ordres si bien préparés par vous, je me rendrai à Saint-Cloud. J’expliquerai à l’Empereur ce qui est en train de s’accomplir. Il n’hésitera pas à nous approuver, et je lui ferai signer un décret portant prorogation de la Chambre, afin que l’immunité parlementaire ne soit pas un obstacle à nos poursuites, et aussi pour nous préserver des scènes de ceux qui ne seront pas arrêtés. Je lui ferai signer encore un autre décret convoquant une Haute Cour à Rennes,