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retardé son accord avec le Saint-Siège, il avait travaillé, par voie législative, à réaliser le désir de son roi. Etudiant les lois, il avait remarqué qu’il était advenu dans le Culturkampf ce qui arrive dans tous les combats : on avait occupé certaines portions de territoire ennemi qui étaient sans valeur. L’étonnant orateur, à cette minute où il allait battre en retraite devant un prêtre, employait ainsi des métaphores de soldat ; mais c’était, en lui, tout ce qui restait de belliqueux : des mots. Il énumérait les « dispositions sans valeur » qu’il s’agissait de rayer du Code ; il désignait, de son doigt dominateur et soumis, « une grande partie de celles qui avaient trait à l’éducation, à la nomination des prêtres, à la juridiction de l’Etat sur l’Église.. »

Certains auditeurs se rappelaient le temps où Puttkamer, un ministre de pacification, pourtant, déclarait que les lois de Mai avaient irrévocablement fixé les frontières essentielles entre l’Église et l’État ; Bismarck, brutalement, allait saisir, une par une, la plupart des bornes frontières, et les reculer. On avait voulu mettre la bureaucratie civile en concurrence avec les supérieurs ecclésiastiques, y compris le Pape ; on n’y avait pas réussi ; tout cet effort de l’État avait eu quelque chose de vexatoire, d’irritant. Bismarck s’acharnait contre cette « duperie, » contre ce « prôton pseudos, » et pour en finir, il était prêt, personnellement, à faire un surcroît de concessions, celles que souhaitait Mgr Kopp. Le pourrait-il, officiellement ? il ne le savait pas encore ; « ce serait à voir ultérieurement, cura posterior. » Il maintenait sa stricte position d’orateur : il tenait, comme membre de la Chambre, des propos dont la conclusion logique eût été l’acceptation immédiate des amendemens Kopp ; mais comme ministre il se réservait. Il passait aux autres dispositions sans valeur, à celles qui concernaient l’éducation des prêtres. Il redisait, comme au temps du Culturkampf, que le clergé allemand était moins patriote que celui des autres pays ; mais par cela même, ajoutait-il, les tentatives de l’État pour s’occuper de son éducation étaient vouées à l’inefficacité. Étaient-elles bien utiles, d’ailleurs ? On avait vu dans ces articles de loi des colonnes de l’État ; « c’est le nom dont souvent on décore le crépi d’un pan de mur qui n’est pas absolument nécessaire à l’existence nationale. » La Prusse, enfin, n’avait empiété sur la ligne de frontière de l’Église qu’en raison du péril polonais ; mais les lois qui allaient germaniser la Pologne seraient l’équivalent de plusieurs