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l’évêque, en vertu d’un pacte spécial avec lui, s’était immiscée, à Fulda, dans l’éducation du clergé.

On ajoutait que l’évêque de Fulda, facilitant à l’État de nouveaux empiétemens, préconisait l’établissement d’un régime dans lequel l’ouverture de toute maison congréganiste serait subordonnée à l’agrément du pouvoir civil. De son côté, la presse libérale, heureuse de cette belle querelle, prêtait à Mgr Kopp, en lui en faisant honneur, certains propos malveillans sur le Centre et sur Windthorst. Il y avait des catholiques, tout prêts à en admettre l’authenticité ; de plus belle, ils s’échauffaient ; et c’était encore, à les entendre, la faute de cet évêque si, dans un district hessois, le candidat du Centre au Landtag de Hesse venait d’échouer, battu par un protestant conservateur. Chaque jour s’allongeait, dans les journaux libéraux, la liste de ses mérites ; certains journaux catholiques n’avaient qu’à recopier pour allonger, chaque jour, la liste de ses méfaits ; on les voyait recopier avec acharnement, et ramasser ainsi des armes chez l’ennemi contre l’évêque qui avait la confiance du Pape. Mgr Kopp se défendit ; la Germania, organe berlinois du Centre, accepta courtoisement une partie de ses explications et fit, sur les autres, quelques réserves importunes. Rome intervint et pacifia les querelles ; il était temps. Par une lettre du 4 décembre 1886, Jacobini justifia Mgr Kopp de ces reproches, que le cardinal qualifiait d’inventions, et le remercia de son activité pour la liberté de l’Eglise et le rétablissement de ses droits.

Il n’eût pas fallu beaucoup d’incidens de ce genre pour mettre en péril la concorde entre l’épiscopat et l’opinion catholique : quelques journalistes avaient réussi, plusieurs semaines durant, à soulever, contre l’évêque qui passait légitimement à Berlin pour l’interprète officieux de Léon XIII, les suspicions du peuple catholique allemand. Cette concorde tant admirée, si souvent célébrée par les documens pontificaux, glorieusement manifestée par les longues années de combat, était menacée par les préparatifs de paix ; et l’on pouvait se demander si l’Église de Prusse, si cohérente, si vigoureusement unie du temps où elle luttait, allait se diviser contre elle-même, avant de désarmer. La presse bismarckienne déployait toute sorte d’adresses pour achever de conquérir Rome : on parlait de certains mouvemens de l’opinion laïque, qui s’insurgeaient en Pologne contre les désirs pontificaux et qui, peu à peu, se répercutaient ailleurs.