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Ainsi que je l’aimais dès ma verte jeunesse
Aimeras-tu la mer, et sa lente caresse
S’allongeant sur le sable d’or comme un baiser ?
Les barques de pêcheurs, légères et coquettes,
Sortant du port ainsi qu’un blanc vol de mouettes
Qui sur les flots va se poser ?

Aimeras-tu, — car tout est contraste en ce monde !
Et le brillant Paris, et la Provence blonde ?
Goûteras-tu de l’un l’élégance et l’esprit ?
De l’autre la douceur, l’air salubre, la joie,
La brise qui frémit, la route qui poudroie
Et le bon soleil qui sourit ?

Auras-tu, comme moi, l’amour des heures calmes ?
Quand un souffle léger, se jouant dans les palmes.
T’apportera la fraîche haleine du jardin ;
Quand tout sera silence, et tendresse, et mystère,
Ne te diras-tu point que, sur la triste terre.
Parfois tombe un regard divin ?

Et plus que le repos infécond et suave,
Chériras-tu le bon, le dur travail qui brave
L’insidieux assaut des soucis dévorans ;
Le travail, ce tonique pur, qui nous relève,
Et nous fait, par l’effort, réaliser ce rêve
D’être meilleurs, d’être plus grands ?

Actif, aimeras-tu les actives journées ?
Connaîtras-tu l’ardeur des longues randonnées
Un fusil à la main, par les champs et les bois ?
Comprendras-tu la joie élégante et jolie
De tenir une épée, éclair souple qui plie
Et qui s’anime entre les doigts ?