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brûlant à l’air. Dès maintenant, la métallurgie a commencé à utiliser les ressources nouvelles que lui fournit la production, par l’air liquéfié, de l’oxygène pur. Parmi les applications les plus étonnantes que cette industrie nouvelle a permis de réaliser couramment, il convient de citer aussi la soudure autogène des métaux, dont les usages sont sans nombre, et que permettent de réaliser les températures élevées que l’oxygène pur provoque par sa combustion avec le gaz, l’acétylène ou le pétrole ; et enfin le coupage des métaux, qui utilise d’une façon inattendue la propriété, que je citais tout à l’heure, et qu’a le fer chauffé au rouge de brûler avec éclat dans l’oxygène. Si on porte une pièce d’acier, par exemple une plaque de blindage au rouge blanc en un de ses points, et qu’on lance un jet d’oxygène pur sur la partie rougie, la combinaison du fer et de l’oxygène se produit avec une telle violence que le métal est traversé, quelle que soit son épaisseur ; on a vu ce mince jet d’oxygène couper ainsi en un instant des plaques de 35 centimètres d’épaisseur.

L’oxygène liquide permet en outre de constituer des explosifs d’une violence extraordinaire. Sur la demande du ministre de la Guerre, MM. d’Arsonval et Claude ont fait récemment des essais au moyen d’aluminium en poudre que l’on plongeait dans l’oxygène liquide, puis qu’on enflammait au moyen d’une capsule de fulminate ; ce nouvel explosif s’est montré équivalent comme force destructive à deux fois son poids de poudre. Il a l’avantage de ne donner, à l’encontre de celle-ci, aucun produit de combustion nocif (le seul produit étant, dans son cas, l’alumine). Il a l’inconvénient, — qui peut être un avantage parfois, — de ne pouvoir être préparé qu’au moment de s’en servir. En tout état de cause, nous ne serions point surpris, si l’art de la guerre lui-même ne devenait quelque jour, de ce fait, tributaire de l’industrie des grands froids. L’explosif charbon-oxygène liquide, — qui, lui, dégage de l’oxyde de carbone toxique, — s’est montré également très remarquable, et à peu près aussi puissant que la dynamite.

Le second résidu de la distillation de l’air liquide, l’azote pur, n’est pas lui non plus sans applications : on sait quelle est l’importance énorme du problème de la fixation de l’azote de l’air sous la forme d’engrais ammoniacaux ou azotés. Or, en faisant passer de l’azote sur du carbure de calcium chauffé au rouge, on obtient très simplement un de ces engrais, la cyanamide. Mais il faut que l’azote employé soit très pur. C’est précisément ce que permet de réaliser la distillation fractionnée de l’air liquide qui a fourni ainsi, — les nombreuses usines à cyanamide par l’air liquide installées à cet effet en Europe en sont la