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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




L’Europe est entrée en vacances : après dix mois de dur labeur, tous les gouvernemens ont été d’accord pour prendre quelque temps de repos et laisser les choses s’arranger conformément à leur logique propre. Deux guerres ont été faites, deux traités ont été conclus. Le premier de ces traités est déjà fortement ébréché, le second a des chances de durer davantage ; ils ne sont toutefois immuables ni l’un ni l’autre. En réalité rien n’est fini, mais quoiqu’il en soit de l’avenir, le présent est au calme. L’Empereur de Russie est parti pour le midi. M. Sasonof va faire une saison à Vichy. Le comte Berchtold va à la chasse. Les ministres anglais se dispersent dans des villégiatures diverses. M. Barthou est en Suisse. Tous les ambassadeurs prennent leur congé annuel. Il semble que la situation soit redevenue normale et que chacun veuille s’en donner l’impression, peut-être l’illusion.

Dans un discours qu’il a prononcé à Lons-le-Saulnier, M. Pichon a défini en termes parfaits la politique de la France au cours de l’épreuve que l’Europe a traversée et il en a constaté les heureux résultats. Une grande puissance a des intérêts partout et nous en avons en Orient ; notre histoire les a créés, notre politique doit les entretenir ; mais ces intérêts n’étaient pas aussi directs ni, si on nous permet le mot, aussi impératifs que ceux de certaines autres puissances et, tout en leur donnant une sauvegarde efficace, nous pouvions et par conséquent nous devions mettre le maintien de la paix au premier rang de nos préoccupations. Nous n’avons pas manqué à ce devoir. Cependant nos alliances nous créaient aussi des obligations qui, si elles n’étaient pas strictement écrites dans les traités, s’imposaient à nous moralement par voie de conséquence et demandaient