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pour la Chambre si elle n’a pas eu une volonté en temps opportun et si elle n’a pas su la faire prévaloir : maintenant la parole est au pays.

La Chambre vient pourtant de finir par une bonne action. Lorsqu’elle se présentera demain devant les électeurs, son actif sera léger, et son passif très lourd : toutefois elle pourra dire qu’elle a enlevé aux préfets la nomination des instituteurs et qu’elle l’a donnée aux recteurs. Cette réforme était demandée depuis longtemps et personne n’y faisait une opposition de principe : on s’arrangeait seulement pour qu’elle fût toujours ajournée. Dans la discussion qui vient de se produire, le gouvernement a pris nettement parti contre elle ; M. le ministre de l’Instruction publique a insisté auprès de la Chambre pour qu’elle maintint l’état de choses actuel ; mais, malgré tout son talent, il a été battu et même à une majorité très considérable. Ce n’est pas que tous les argumens de M. Viviani aient été mauvais ; ce sont les préfets qui le sont et qui ont rendu la réforme nécessaire. S’ils étaient ce qu’ils devraient être et ce qu’ils ont été quelquefois, rarement à la vérité ; si, au milieu des passions et des hostilités locales, ils représentaient une autorité supérieure, éclairée, impartiale, uniquement préoccupée de maintenir chacun à sa place et d’établir entre tous la concorde, l’harmonie, la paix ; oui, certes, si les préfets étaient cela, nous serions les premiers à demander qu’on leur laissât la nomination des instituteurs. Nous ne sommes pas les admirateurs sans réserve de l’Université. L’esprit de corps a ses abus et, lorsque nous le voyons s’étendre à toute la masse démocratique des instituteurs, la crainte nous vient que, là aussi, ces abus ne se convertissent en dangers. Les instituteurs seront donc nommés par les recteurs, sur la proposition des inspecteurs d’académie : mais on a placé à côté de ces derniers un Comité consultatif composé de l’inspecteur d’académie lui-même, des inspecteurs primaires, du directeur et de la directrice des écoles normales, enfin des représentans élus des instituteurs et des institutrices au Conseil départemental. Sur le papier, cela est très bien ; en fait, on sait comment sont souvent nommés ces représentans élus. Nommés sous l’influence des syndicats, ils sont animés de leur esprit, et c’est pourquoi la composition de ce Comité consultatif n’est pas sans nous inquiéter. L’article qui la détermine a pourtant été voté à l’unanimité de 545 votans : il faut donc croire qu’il y avait là une nécessité devant laquelle tout le monde s’est incliné.

On a discuté longuement, ardemment, pour savoir si la nomination des instituteurs, après avoir été enlevée aux préfets, serait