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ce qui se passe dans le monde politique et ailleurs, et vous met véritablement sur la sellette.


30 octobre. — Il est onze heures et je pars à midi pour Londres. Je profite de l’heure qui me reste pour mentionner ici que l’ambassadeur vient de recevoir de l’Empereur la Toison d’Or. Lorsqu’il a ouvert les dépêches de Vienne que le dernier courrier lui a apportées, la première qui est tombée dans ses ; mains a été le billet autographe de Sa Majesté. Nous sommes tous ici dans une inexprimable joie. Personne n’est plus digne que ce chérissime cousin de porter la Toison. Jamais elle n’aura reposé sur un cœur plus loyal, plus sincèrement attaché à son souverain et à son pays et, m’eût-elle été accordée, que je ne serais pas plus heureux que je ne le suis en ce moment.


Chatsworth, 30 octobre[1]. — Je suis ici depuis trois jours, encore tout ébahi de la magnificence qui m’entoure dans ce vaste palais. Au milieu d’un parc immense s’étendent de larges terrasses superposées, ornées de rampes superbes, de vases, de statues, de jets d’eau et de fleurs ; de larges escaliers conduisent de l’une à l’autre par des grilles en fer admirablement travaillées et toutes brillantes de dorures.

Pour arriver dans la première cour du château, on traverse une espèce d’arc de triomphe avec de belles colonnes, flanqué de deux autres portiques d’une architecture imposante et noble. La seconde cour se trouve séparée de la première par un beau mur en pierre de taille sculptée dont la partie supérieure est ornée de beaux attiques surmontés de vases et réunis l’un à l’autre par des grilles très élégantes.

On entre dans l’intérieur du château, par un merveilleux vestibule, avec des cheminées en marbre blanc, un pavé magnifique, des statues et bustes antiques, des vases dorés et un très beau perron en marbre poli, orné de bronze. Par une galerie superbe, on arrive à un escalier monumental d’une richesse incomparable, qui dessert deux étages. On marche sur des dalles en marbre blanc, noir et lilas formant de très riches

  1. À cette date, le comte Rodolphe parcourait l’Angleterre où il s’était rendu pour répondre à une invitation du duc de Devonshire. Le récit qu’il fait de son séjour chez son richissime amphitryon, nous apprend ce qu’était, il y a soixante-quatorze ans, la vie que menait dans ses terres un grand seigneur anglais.