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le faisant reposer sur des constatations purement conjecturales, on invoque la justice, on se flatte de faire une œuvre de progrès. Il importe d’examiner ce système et les prétentions sur lesquelles il repose, de rechercher s’il constitue vraiment un perfectionnement, une amélioration, au double point de vue de la justice et de la productivité, si c’est vraiment là une œuvre moderne ou si, au contraire, ce n’est pas un retour à de vieilles formules ataviques qui ont été appliquées dans des états sociaux disparus et qui ont été abandonnées parce qu’on les a reconnues comme erronées et néfastes.


I. — ORIGINE ET NATURE DU SYSTÈME FISCAL FRANÇAIS

Pour bien apprécier l’origine de ces impôts, qu’une certaine école porte aux nues, impôts personnels, globaux et progressifs sur le revenu, sur le capital, sur la plus-value et l’enrichissement, taxes démesurées sur les successions, il importe, sans qu’il soit nécessaire de remonter aussi haut que les républiques italiennes du Moyen âge ou les républiques de la Grèce antique, de se placer tout au moins à la fin du XVIIIe siècle et au commencement du XIXe. Nous allons, pour cette raison, faire un résumé rapide de la genèse des systèmes fiscaux actuels, dans les trois principaux pays d’Europe : en France, en Angleterre et en Allemagne.

À ces dates, on trouve les impôts personnels sur le revenu, sur le capital, parfois aussi sur l’enrichissement, les hautes taxes successorales, en pleine application dans les différons pays du Continent européen. Ce sont essentiellement les formules d’impôt du Moyen « âge : l’impôt sur les personnes, la capitation graduée, les contribuables y étant classés en séries, d’après les évaluations administratives, ce sont là les méthodes d’impôts qui régnaient au XVIIIe siècle, ayant des racines très anciennes. L’administration, suivant ses lumières, bien sommaires et incertaines, mais moins sujettes à erreur, dans une société régulièrement stratifiée et peu mouvementée, que dans les sociétés modernes, classait à son gré les imposables.

Tels étaient aussi, ou à peu près, en France, les impôts directs de l’ancienne monarchie, la capitation, la taille, qui ne frappait que les roturiers, les vingtièmes (ou taxe du vingtième du revenu) qui atteignaient aussi les classes privilégiées. Toutes