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d’abord l’instruction militaire des jeunes gens, fortifier les réserves, maintenir par divers moyens les effectifs de nos troupes de couverture. Il est clair que ces mesures demanderaient du temps pour être appliquées et pour donner des résultats satisfaisans. On peut donc espérer que si, pendant la législature qui s’ouvre, la loi militaire est complétée, elle ne sera pas modifiée aussi profondément que l’exigent les socialistes.

En ce qui touche le problème fiscal, on ne peut pas se prononcer avec une certitude absolue sur l’opinion des députés : les uns ont employé des formules contradictoires, en demandant, par exemple, un impôt progressif sur le revenu déclaré, mais sans inquisition ni arbitraire ; d’autres ont soutenu qu’il fallait taxer plus largement la « richesse acquise » que les produits du travail, sans se douter que notre système actuel d’impôts leur donnait déjà ample satisfaction. Quoi qu’il en soit, 230 députés environ ont accepté la formule intégrale du Congrès de Pau ; mais ils n’ont pas pris la peine d’en expliquer le sens, ils n’ont pas dit en quoi consisterait la déclaration et comment s’exercerait le contrôle. Dans ces conditions, le débat va continuer, peut-être plus confus que jamais, devant la nouvelle Chambre. Sans doute, un ministère qui s’appuierait sur les socialistes devrait s’efforcer de faire aboutir un projet d’impôt personnel et progressif sur le revenu, dont l’application serait d’ailleurs très compliquée et surtout très lente. Mais s’il obtenait, ce qui n’est pas sûr, une majorité au Palais-Bourbon, réussirait-il à entraîner le Luxembourg dans une voie aussi dangereuse pour nos finances ? Il ne pourrait pas, croyons-nous, imposer la rente et frapper les revenus sous une forme inquisitoriale dans les circonstances actuelles. Quel que soit ce ministère, il devra comprendre la nécessité de ne pas alarmer davantage les capitaux ; il aura besoin de contracter à bref délai un emprunt d’un milliard et demi pour payer les dépenses extraordinaires de l’occupation du Maroc, de la Guerre et de la Marine, pour alléger la dette flottante et couvrir le déficit assez élevé du budget de l’exercice 1914 qui n’est même pas encore voté. S’il obéissait aux ordres des socialistes et s’il aggravait ainsi la crise qui sévit sur le marché des capitaux, son emprunt indispensable ne serait pas souscrit : comment le Trésor public pourrait-il alors tenir ses engagemens ?

La question qui a fait le moins de bruit au cours de la