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il a été victime des groupes et des sous-groupes dont il a voulu à tout prix avoir des échantillons complets dans sa boutique ministérielle, et son échec n’a diminué ni la gravité de la situation, ni l’embarras de M. le Président de la République.

Pourtant l’épreuve n’a pas été inutile ; une leçon en est ressortie qui sera salutaire, si on en profite, et que nous verrons d’ailleurs s’accentuer encore dans la suite de la crise : c’est qu’on ne doit compter à aucun degré sur l’esprit de conciliation des socialistes et des radicaux unifiés. Ils sont intransigeans sur les idées, ils le sont aussi sur les personnes. La phrase incidente qui leur a déplu n’est pas le seul motif pour lequel MM. Godard et Ponsot se sont retirés de la combinaison et l’ont fait échouer : ils n’y acceptaient pas la présence de M. Jean Dupuy, homme de bon sens et d’opinions modérées. Les journaux de leur parti ont accusé acrimonieusement M. Jean Dupuy d’avoir tout gâté en exigeant le maintien du membre de phrase dont MM. Godard et Ponsot exigeaient la radiation : or il paraît que M. Dupuy n’assistait même pas à la réunion où le conflit a éclaté. Mais il n’appartient pas au parti radical et radical-socialiste, et ce parti veut tout pour lui en ne laissant rien aux autres. Son Comité exécutif s’est réuni dès le début de la crise et a voté une résolution qui mérite d’être reproduite. La voici : « Le Comité exécutif, résolu à faire appliquer, dans son esprit et dans sa lettre, le programme de Pau, approuvé par la majorité du corps électoral, invite ses élus à n’accorder leur confiance qu’à un gouvernement disposé à en poursuivre la réalisation avec le concours des groupes de gauche, à l’exclusion de tout parlementaire de la Fédération des Gauches et de l’Alliance démocratique, et leur demande, parallèlement à l’effort continu de laïcité, de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour mettre en œuvre la conception de la nation armée, qui, impliquant la réduction du service actif, accroîtra en même temps la puissance défensive du pays, et d’assurer, dès le vote du budget et la loi de finance actuellement soumis au Sénat, la couverture financière des nouvelles dépenses militaires par des impôts sur la richesse acquise, et de rendre définitives les dispositions fiscales adoptées par la Chambre de 1909. » Tel est le mot d’ordre du parti : il est filandreux, mais très net. Et ici encore il y a un membre de phrase important, celui que nous avons écrit en lettres italiques » Il ne figurait pas dans la rédaction primitive, qui sentait déjà l’ostracisme, mais pas assez au gré de tous : un pur trouve toujours un plus pur qui l’épure, et il s’est trouvé, dans le Comité exécutif, des purs