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soi seul » avait toujours été l’ambition de l’Empereur, comme des rois de France ou d’Espagne.

Tandis que partout frémissaient l’impatience, l’inquiétude et de secrets espoirs, le conclave achevait de s’organiser dans la paix du Vatican.

L’aube du 20 février vit la procession du Sacré Collège s’avancer dans la Sixtine : tout était prêt pour les séances. Elevés autour du chœur et surmontés de leurs baldaquins, soixante-huit trônes attendaient les éminentissimes électeurs : deux pupitres, un à droite et un à gauche du sanctuaire, allaient servir à la rédaction de leurs bulletins, et, sur les marches de l’autel, une longue table dressée était un lieu propice au dépouillement des scrutins futurs. La funzione s’ouvrit par la messe du Saint-Esprit : elle fut célébrée par le doyen du Sacré Collège, Ottoboni, et tous ses confrères communièrent de sa main. Il devait en être ainsi tous les matins. L’office terminé, le prélat Reali, premier maître des cérémonies, lut à haute voix le règlement du conclave ; il rappela que le camerlingue, président de l’assemblée, désignerait tous les trois jours et dans chacun des trois ordres, un cardinal gardien chargé de la police intérieure et de la surveillance de la clôture, un cardinal scrutateur préposé au dépouillement des scrutins et un cardinal infirmier qui irait, dans la cellule des malades, chercher leurs bulletins de vote. Il exposa ensuite dans quelles formes l’élection pontificale devait être faite. Celles-ci sont encore usitées aujourd’hui. Le Souverain Pontife est nommé par les seuls cardinaux, à la majorité des deux tiers. Trois modes d’élection sont autorisés : l’adoration, le scrutin, l’accès. Le premier est peu employé, car il présuppose l’unanimité des cardinaux sur un candidat. En cette occurrence, le vote a lieu par acclamations dans la première séance du conclave, et le pape est déclaré aussitôt. Le scrutin et l’accès obligent au contraire les cardinaux à mettre leurs suffrages par écrit : ils peuvent porter sur un nombre illimité de sujets, et on les recommence, tant que la majorité requise n’est pas atteinte.

Lorsqu’elle se dessine, le camerlingue propose à ses confrères de rectifier leurs votes et de se rallier sur les noms les plus favorisés. C’est là ce qu’on appelle l’accès. Chaque jour, on distribue aux cardinaux les bulletins nécessaires. Faits de simple papier, ils sont divisés en trois compartimens. Dans le premier l’auteur inscrit son propre nom (Ego… X… Cardinal… X….)