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églises et des écoles grecques de Turquie. Les faits signalés sont les suivans : attaques à main armée, incendie, meurtres, mise à sac des maisons et des églises ; des notables et des chefs de communautés ont été contraints par la force de signer des déclarations, reconnaissant que la population a quitté les lieux de son plein gré.

Sur les golfes d’Adramyte et de Tchandarli, qui viennent immédiatement au sud de la Troade, j’ai recueilli, outre quelques récits de réfugiés, des déclarations formelles de deux étrangers : un sujet autrichien et un sujet russe, qui ont été témoins des violences et, d’autre part, ont été eux-mêmes chassés par des moyens indirects, comme je l’ai été, le 21 juin, de Phocée. La dévastation a commencé le 8 juin. Dans certains villages, on a résisté deux jours et deux nuits et, devant cette obstination, la troupe est intervenue ; plusieurs de ces villages ont été brûlés. Dans la ville de Tchandarli, un officier avec trente soldats sont venus, sous prétexte de maintenir l’ordre ; ils ont appelé les autorités grecques et leur ont enjoint d’évacuer dans le délai de trois heures. Les deux témoins, propriétaires dans le pays, ont voulu abriter des réfugiés. L’officier s’y est opposé et a obligé ceux-ci à se rendre à pied jusqu’à la mer. Une bande de quarante personnes s’est ainsi mise en route ; trente-trois ont été massacrées avant leur arrivée au port. A l’arrivée des expulsés à Dikili, chevaux, charrettes, ballots, appartenant aux survivans, ont été confisqués.

L’histoire de la résistance d’Aivali, ville importante, située sur la côte dans cette région, ne m’est pas connue ; elle n’avait pas pris fin à mon départ de Smyrne, le 1er juillet ; des nouvelles alarmantes en sont arrivées à Athènes le 9 juillet.

A Pergame, grande ville de 10 000 habitans, le caïmacam a appelé le vicaire et lui a déclaré que les Grecs devaient quitter la ville dans les deux jours. Le lendemain le mufti renouvela cet ordre. Une grande partie de la population a évacué, dans la crainte de violences ; le reste de la population a été expulsé par force dans les mêmes conditions qu’à Phocée. Les mohadgirs de Macédoine sont arrivés le 11 ; j’ai assisté à leur embarquement à Smyrne, sur le Dikili ; eux aussi emportaient des ballots, des malles, du mobilier et ne présentaient pas la moindre trace de violence. Il ne reste plus aucun Grec ni à Pergame, ni dans toute la région environnante. La valeur des