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« J’aime à dormir tourné vers toi, comme pour donner à mes dernières pensées avant le sommeil un cours plus facile vers tes habitans. Il y a deux tropiques et deux pôles : un seul occupe mon esprit. Et je regarde avec plus d’amour, quand la nuit est belle, les astres qui brillent sur le pôle austral. »

Et puis : « Mer pacifique. Pourquoi nommée ainsi ? Par l’habitude où sont les hommes de placer dans leur imagination le repos et la paix en des endroits inaccessibles, ainsi que les anciens appeloient Fortunées les îles Canaries, placées dans l’Océan où la nature de leurs navires et leur ignorance dans la marine ne leur permettoit guères de naviguer. » Il n’a jamais vu la mer, pas même du rivage ; et, de mariniers, il n’en vu que sur la petite Vézère. Mais le voici lancé à des périples imaginaires, par Cook : « Tu m’as fait épouser la mer ; et l’attrait naturel qu’avoient pour moi les eaux courantes s’est accru depuis que les flots t’ont porté dans ces régions délicieuses. »

Que de singularités !… « Cette partie du monde, non seulement n’a pas d’habitans, mais n’a pas même de lieu. Là tout est mer, excepté la mer même convertie en îles de glace qui ont leurs montagnes et leurs plaines. Elles présentent aux regards des images de tours, de clochers, de murailles et de maisons, et la même variété de formes que les nuages d’où elles sont descendues. » Et le refrain d’Otahiti : « Otahiti ! que tes filles sont belles et que tes hommes sont doux ! Ta découverte, île charmante, ne sera pas inutile au bonheur du monde… »

Samedi 22 décembre 1187… Et ce ne sont que des bribes de phrases, mais jolies : «… Et ce que l’Océan environoit, quand il se route autour des pôles… Délicieuses relâches !… Latitudes et longitudes, pour largeur et longueur ; une langue particulière est employée pour parler de ces grands objets… C’est pour eux (les Olahitiens) que les soleils de nos hyvers se hâtent de tomber et de descendre ; et ses rayons les ont touchés quand il se lève. Tu viens d’Otahiti, père du jour… Nous partageons avec eux le sommeil et la veille… Lointain pays où le dormir est doux… »

22 janvier 1788 : « Portez-leur la rose et qu’elle pare des seins qu’on dit semblables à ceux des statues grecques… »

Il n’est pas jusqu’au langage otahitien qui ne séduise Joubert ; et Joubert en copie des mots avec soin : « Epaha tayo maleme taiye no tabano to nota wa whamo maiye… »