Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 25.djvu/127

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
123
LA BELGIQUE MARTYRE.

qu’ils ne pouvaient plus avancer. » Et les gros rires d’éclater dans le bataillon satisfait ! Le soldat V. H. a été fait prisonnier près d’Aerschot ; il a été livré à un officier et à trois soldats qui l’ont ligoté, lui demandant où était son régiment, où se cachait le gros des troupes ; il n’a pu ou n’a pas voulu répondre : alors on l’a jeté à terre, accablé de coups de pieds, et on l’a abandonné enfin, toujours serré dans ses cordes, après lui avoir arraché son manteau. Une infirmière, Mlle  R. B., a vu, le 25 août, dans Eppegem, un prisonnier dont on frappait la tête à coups de crosse ; plusieurs morts qu’elle a recueillis dans les rues de ce même village avaient eu la tête fracassée par de tels coups. Dans une reconnaissance, le soldat Piérard a été surpris avec ses camarades. Comme il était blessé, on l’a pansé. Puis, à coup de baïonnettes, on les a chassés, lui et les autres, devant deux compagnies allemandes qui tiraient sur eux. Affolés, certains d’entre eux se jettent dans le Demer, qui longe la route : on continue à tirer. Piérard se précipite sur la berge, et, comme un homme vient de le mettre en joue et de le manquer, un officier fait remarquer qu’un Belge ne vaut pas une balle, et il commande de l’enfoncer dans l’eau. Le malheureux parvient à se glisser sous les roseaux où il s’accroche, et demeure ainsi, la tête seule émergeant, jusqu’au matin. Aux soldats Goffin et Heyvaerts qu’ils ont pris le 6 août, les Allemands ont lié les mains : ils les poussent devant eux, plaçant leurs fusils sur leurs épaules. Ils leur ordonnent de crier : Belges, ne tirez pas ! Ce sont des Belges !… Pendant la retraite de Namur, le fantassin Parfonry est tombé entre leurs mains avec un groupe d’hommes. On leur a joint les poignets derrière le dos, on les a attachés quatre par quatre, on les a fait marcher tout le jour, à coups de plat de sabre et de crosse, pour les jeter enfin dans les caves du château de Saint-Gérard. Ils ont enlevé de son poste, pour on ne sait quel motif, le chef de station de Baelegem : ils l’ont traîné, la corde au cou, derrière leurs chevaux, — au pas, au trot, au galop ! Une estafette, à Aerschot, le 25 août, arrive annoncer une mauvaise nouvelle ; ce prisonnier la paiera : il est percé d’un coup de lance !

Le nommé Burm (J. L.), du 24e de ligne, déclare que, fait prisonnier par les Allemands, ceux-ci, pour l’obliger à parler, lui ont trempé les mains dans l’eau bouillante. Il a vu près de lui deux autres soldats belges torturés : l’un d’eux qui s’était