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reçue à l’assaut de la grande redoute. Il fit la campagne de Saxe en 1813, la campagne de France en 1814 et se trouva ramené, par les événemens de 1815, à défendre la frontière française dans les environs mêmes de sa ville natale, Pont-à-Mousson.

Louis-Philippe l’a fait général commandant la place de Paris, rendant ainsi justice à celui que la Restauration avait écarté et réduit à la demi-solde. Elle se vengeait de l’homme dont la brochure sincère sur Lyon en 1817 avait dénoncé les intrigues du général Canuel dans cette ville et les encouragemens donnés par ce chouan aux agens provocateurs.

Le complot militaire de 1820, où l’on avait voulu à tort impliquer le général Fabvier, lui donna une autre occasion de faire éclater sa probité et son innocence. Acquitté par la Cour des pairs et devenu libre de combattre pour ses idées, il soutint en 1823 avec Armand Carrel la cause des constitutionnels espagnols, puis en 1827, celle des insurgés grecs.

Les deux années dernières, il s’était entièrement consacré à la duchesse de Frioul, dont il défendait les intérêts en France et à laquelle il servait de cicérone en Italie. La Heine le supplée ici dans ce dernier rôle ; elle sait si bien l’histoire d’Angleterre qu’elle en remontre partout aux guides, et corrige leurs bonimens.

Le général Fabvier désirant visiter l’arsenal de Woolwich, la Reine s’est adressée pour cela à sir Arthur Kempt, qui a répondu en envoyant avec un billet gracieux un laissez-passer. Il est assez plaisant que cette visite nous ait fait nous rencontrer avec trois carlistes de marque, le maréchal de Bourmont, le prince Charles de Broglie et le vicomte Berthier.

Le maréchal de Bourmont approche de la soixantaine. Son âge seul, sans parler de son passé, expliquerait l’attitude qu’il a prise de refuser le serment à Louis-Philippe et de renoncer à parcourir une nouvelle carrière sous le gouvernement de Juillets On conçoit difficilement aussi quel emploi il pourrait tenir dans la France d’aujourd’hui et quel accueil les anciens militaires rentrés dans l’armée lui réserveraient. On connaît sa trahison en 1814, à la veille de Waterloo, et ce n’est pas la première de sa vie. Pour l’en récompenser, Louis XVIII lui donna le commandement d’une division de la garde. Charles X, qui s’ingéniait à choisir les noms les plus impopulaires pour en composer son gouvernement, le fit ministre de la Guerre en 1829. Dans