Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 26.djvu/159

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

plus de dix ans par le Conseil supérieur des sociétés de secours mutuels, aurait pour but de permettre à ces bienfaisantes institutions d’étendre leur action et de remplir complètement leur mission économique et sociale. Il ne s’agirait pas d’ailleurs d’une loi nouvelle, mais d’une mise au point de la loi du 1er avril 1898, qui est, comme on le sait, la charte actuelle de la mutualité. Les propagateurs les plus zélés du mouvement mutualiste ont souvent constaté avec un vif regret toutes les difficultés qui s’opposent à ce qu’ils pénètrent dans les milieux ouvriers les plus humbles, précisément ceux où leur intervention serait le plus utile. Mêler l’effort mutualiste à l’action syndicale, comme l’avait d’ailleurs prévu la loi de 1884, ce serait faire faire un pas immense à la question sociale. Il appartient aux pouvoirs publics de favoriser un résultat si désirable, et, pour cela, ils auraient à envisager les mesures suivantes :

Procéder tout d’abord à la mise au point dont nous parlions plus haut de la loi sur les sociétés de secours mutuels et la débarrasser des quelques dispositions contre lesquelles les mutualistes sont unanimes à protester ; faire à la mutualité une part plus large dans l’application des lois de prévoyance où elle peut être un auxiliaire si utile, augmenter sa participation à l’exécution de la loi des retraites ouvrières, la choisir nettement comme l’instrument de la retraite-invalidité ; enfin, se montrer plus large dans l’allocation des subventions, qui sont aujourd’hui si parcimonieusement mesurées aux sociétés de secours mutuels. Si l’on veut bien réfléchir, on constate que l’argent donné par le Trésor à la mutualité est une simple avance, un placement de père de famille, car toute extension des sociétés de secours mutuels allège d’autant les charges de l’Assistance publique, et il est à la fois plus normal, plus juste et plus économique d’encourager la prévoyance que d’avoir à secourir la misère.

Nous croyons en somme que, pour la solution du problème social, il faut compter avant tout sur le développement des associations libres soutenues par l’aide généreuse de l’État et que, sans renoncer pour toujours à de nouvelles améliorations légales en faveur des travailleurs, on devrait faire confiance aux initiatives privées dont l’action a déjà été si féconde et dont on peut encore beaucoup attendre. Enfin on ne saurait se lasser de répéter, — surtout à un moment où l’on a quelques chances