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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Au milieu de tant de questions qui sont en ce moment posées, l’attention continue de se porter sur la prétention de l’Allemagne de fermer une grande étendue de mers à la navigation des neutres aussi bien que des belligérans. En vertu d’un chiffon de papier, — ici l’expression est parfaitement exacte, — l’Allemagne a prononcé cette interdiction et cette clôture et elle leur a donné pour sanction la menace adressée aux navires de tous les pays indistinctement d’être coulés sans avertissement préalable. L’Allemagne a-t-elle le moyen matériel de réaliser sa menace ? Possède-t-elle pour cela un assez grand nombre de sous-marins ? Cette arme nouvelle est-elle en mesure de produire de semblables effets ? L’expérience le prouvera : en attendant, il est permis d’en douter. L’Allemagne ne vise à rien moins qu’à affamer l’Angleterre : elle n’y réussira pas, mais elle peut couler un certain nombre de navires, et c’est contre quoi les neutres protestent avec une énergie croissante et une résolution dont nous verrons sous peu les effets. L’exemple donné par l’Amérique a été bientôt suivi par toutes les Puissances européennes particulièrement intéressées, l’Italie, la Suède, la Norvège, le Danemark, la Hollande. Toutes déclarent qu’elles rendront l’Allemagne responsable de ses méfaits. Ces protestations se ressemblent dans le fond, et c’est à peine si elles diffèrent dans la forme : nous nous attacherons surtout à celle des États-Unis, parce qu’elle est la plus importante et la plus développée. C’est l’honneur de l’Amérique de prendre aujourd’hui en main la grande cause de la liberté des mers.

Aussitôt après avoir pris connaissance du Mémorandum allemand, le gouvernement américain y a répondu par une note que son ambassadeur à Berlin, M. Gérard, a été chargé de remettre à M. de Jagow. Il était de son devoir de « prier instamment le gouvernement impérial allemand de réfléchir, avant d’agir, sur la situation critique