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du 22 décembre 1911 substitua une organisation définitive aux rouages administratifs juxtaposés à titre provisoire et créa une véritable préfecture maritime ; le contre-amiral coordonnait l’action des services, de manière à pousser les travaux en leur assignant comme but final la disponibilité des forces navales pour le combat. Enfin, en 1913, le littoral algéro-tunisien fut organisé en arrondissement maritime, avec Bizerte pour chef-lieu. Un décret nommait le vice-amiral Dartige du Fournet, commandant en chef préfet maritime, avec résidence à Bizerte.

La nomination d’un officier général à Bizerte amena la réunion dans ce port, sous le nom de « station navale de Tunisie, » d’une sorte de Cluny naval, d’unités hors d’âge, « rossignols » sans valeur militaire, dont les noms évoquent de très lointains souvenirs : les canonnières cuirassées Mitraille, Phlégéton, Fusée, le garde-côtes Tempête, bon tout au plus, à porter le pavillon à la double étoile. Station navale équivalente à zéro, comme grosses unités. Fort heureusement, ces bâtimens archaïques ont été vendus comme ferraille, sauf la Tempête, coulée sous les tirs de l’artillerie. Le plan d’armement pour 1915 comprend, outre le cuirassé Henri-IV, comme pièce de résistance, 39 petites unités : 22 contre-torpilleurs et torpilleurs, plus 17 sous-marins, dont 12 offensifs et 5 défensifs. Le commandant du Henri-IV exerce le commandement supérieur de la Défense mobile et de la Défense fixe de Bizerte. Toutefois, les événemens ayant obligé la Marine à faire flèche de tout bois, le Henri-IV a reçu l’ordre de partir pour l’Orient en remplacement du croiseur Bruix, qui a rallié la Tunisie. Aujourd’hui, le Henri-IV a repris son poste à Bizerte.


Dans le principe, la C. P. B. espérait que Bizerte attirerait « les navires de commerce de tous les peuples, » qu’elle arriverait même à dépasser Alger pour le trafic du charbon[1]. Malheureusement, à l’époque où l’on travaillait à rendre Bizerte accessible, on creusait le port et le canal de Tunis ; et Tunis, terminé avant Bizerte, resta le centre commercial de tout le Nord tunisien, l’aimant attirant à lui la limaille du trafic. Bizerte, à la

  1. La fourniture de charbon faite à la navigation par le port d’Alger, 8 000 tonnes en 1885, atteignait 643 311 tonnes en 1911.