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mis en liberté ; ils s’unirent aux soldats pour entrer dans les maisons, désormais désertes, et en emporter tous les objets de quelque prix. Des maisons ils passèrent aux églises, des églises aux musées nationaux[1]. »

Les généraux malades qui étaient restés à Milan furent condamnés a mort. Le pillage de la ville fut terrible. « Quand les Autrichiens rentrèrent à Milan, dit La Varenne, ils brûlèrent les meubles, livres, papiers de famille… ils donnaient les robes des dames aux filles qu’ils amenaient avec eux[2]. » Les temps n’ont pas changé et l’on reconnaît la manière. On peut supposer après cet échec, la fuite de son roi, le pillage de Milan par l’ennemi qu’elle avait espéré voir anéanti, que la princesse est découragée : il n’en est rien. Ces événemens sont du mois d’août. De retour à Paris elle écrivait à M. Rendu, rédacteur au Siècle, en le priant de faire passer « ce fragment d’une adresse de l’émigration lombarde à la République française. »

L’adresse, qui est datée de Lugano (28 septembre 1848), débute ainsi :

« Au Gouvernement de la République française avant que les Puissances médiatrices aient fait connaître leur intention au sujet de l’Italie et de crainte que l’opinion publique ne soit égarée sur une fausse appréciation des faits, nous croyons nécessaire d’interpréter la pensée du peuple italien, juge suprême en pareille question…

« Toute médiation ayant pour but le bien-être et la pacification de l’Italie doit être appuyée sur ces deux faits : l’émancipation absolue de l’Italie de toute domination directe ou indirecte de l’Autriche.

« La question italienne n’est pas une question d’organisation ou de politique intérieure, c’est une question nationale, une question d’indépendance… »

Après avoir invoqué les sympathies de la France et l’exécution de ses promesses, les réfugiés italiens concluent ainsi :

« Si le jour d’une fraternité franche et loyale des nations n’était pas encore venu, même pour la République française, si les peuples ne peuvent attendre encore de cette République une diplomatie autre que celle de Louis XVIII et de Louis-Philippe, nous disons avec une tristesse profonde, mais sans

  1. L’Italie et la Révolution italienne en 1848.
  2. La Varenne, Les Autrichiens et l’Italie, p. 86.