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Sous ces divers rapports aussi bien qu’au point de vue spécialement financier, notre position et celle de nos alliés est favorable. La France et l’Angleterre tirent encore un autre avantage d’une situation qui leur est spéciale et qui résulte du portefeuille de valeurs étrangères qu’elles possèdent. C’est aux époques de crise comme celle que nous traversons que l’utilité de ces placemens apparaît le plus nettement. La Grande-Bretagne, avec ses 80 ou 100 milliards de francs de titres coloniaux et étrangers, nous-mêmes avec nos 40 milliards de ces valeurs, sommes créanciers de revenus considérables, qui nous sont versés tous les ans sous forme de coupons d’intérêt, de dividende ou de remboursement de titres. Tout en tenant compte du fait que la guerre a compromis passagèrement certaines de ces créances, il n’en rentre pas moins des sommes encore très élevées, qui augmentent nos ressources et celles de nos alliés anglais. Elles ont un autre effet important, c’est de maintenir les changes à un niveau favorable. Du moment où nous avons des centaines de millions à recevoir du dehors, notre monnaie fait prime par rapport à celle de nos débiteurs. C’est le phénomène qui s’est manifesté pendant les sept premiers mois de la guerre. S’il s’est récemment produit quelques changemens à cet égard, ce n’a été que vis-à-vis de la monnaie d’un pays allié et de deux pays neutres. Comme nous effectuons des achats énormes en Angleterre, aux États-Unis, en Espagne, la livre sterling, le dollar, la peseta, sont cotés avec une prime de 1, de 2 et de 3 pour 100 par rapport au franc. Mais c’est là un fait passager, et dont l’explication est assez claire pour que nous n’ayons pas à prouver qu’il n’infirme en rien la force de notre démonstration. M. Ribot dans les discours qu’il a prononcés à la Chambre le 7 mai et au Sénat le 14 mai 1915, a fort bien exposé les circonstances qui ont amené cette hausse des changes, en particulier du change britannique et américain, en même temps qu’il expliquait les mesures prises par lui pour l’enrayer. L’une d’elles consistera dans l’envoi que nous ferons à Londres d’un demi-milliard d’or, qui fortifiera le stock métallique de nos alliés. Ceux-ci en revanche mettent 42 millions de livres sterling à notre disposition. Les créances de diverse nature que des Français peuvent avoir sur la Grande-Bretagne viendront 1res heureusement agir dans le même sens. Tout ce que nous pouvons regretter, c’est que nos capitalistes n’aient