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pas trouver à l’étranger des fromens moins chers que les grains indigènes. Les assurances maritimes dont le coût s’est élevé viennent grossir le total des frais d’expédition, et enfin l’encombrement des ports où la main-d’œuvre fait défaut impose aux armateurs des retards onéreux.

Ces faits sont regrettables assurément ; les sacrifices imposés au consommateur ont augmenté et vont peut-être augmenter encore pendant quelques semaines ; mais, en vérité, il est impossible d’oublier quelle est la gravité du conflit dont le monde entier subit les conséquences. Ainsi l’immobilisation des deux flottes commerciales de l’Allemagne et de l’Autriche a réduit de 14 pour 100 le tonnage des navires marchands ; les transports de guerre nécessitent l’emploi du cinquième de la marine de commerce en Angleterre.

Il serait assurément bien étrange qu’un pareil bouleversement des conditions ordinaires de transport restât sans effet sur les prix. Mais, qu’on le remarque bien, en ce qui concerne spécialement le blé, il n’est pas permis de parler de disette. La récolte totale de l’année 1914-1915 est aujourd’hui connue ; le Bulletin de l’Institut international d’Agriculture à Rome a publié les évaluations faites, et voici les chiffres que nous pouvons accepter sans crainte sérieuse d’erreur :


Récoltes du blé dans le monde en millions de quintaux


1914-15 1 003
1913-14 1 092
1912-13 1 025
1911-12 946
1910-11 933

Il est clair que les quantités récoltées pendant l’année agricole 1914-1915 sont presque égales ou même supérieures à celles des quatre années précédentes. Certains stocks, assurément, ne sont pas disponibles immédiatement ; c’est le cas des blés russes immobilisés dans les ports de la Mer-Noire. Les arrivages sont plus difficiles et plus lents ; les transports sont plus coûteux, le prix des assurances est plus élevé, bref, tout concourt à l’élévation des prix sans que les disponibilités aient été cependant réduites au point de nous obliger à rationner le consommateur comme en Allemagne et en Autriche.

« C’est là, nous dira-t-on, une très mince consolation pour