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influence : si on place sur le sol une série de cartouches de dynamite alignées et séparées les unes des autres par des espaces d’un décimètre et plus et qu’on fasse détoner l’une d’elles, les autres explosent à leur tour et presque immédiatement, par l’effet du choc qui, grâce à l’inertie de l’air, s’est transmis de l’une à l’autre.

Tous les explosifs connus se décomposent suivant l’un ou l’autre de ces modes, quand ce n’est pas, comme la dynamite, suivant les deux, et c’est ainsi qu’on a été amené à distinguer les explosifs fusans et les explosifs détonans ou brisans.

Les premiers portent couramment et plus spécialement le nom de poudres, les seconds sont les explosifs proprement dits. C’est ainsi que nous les désignerons désormais, de ces noms consacrés par l’usage et bien qu’assez impropres en toute rigueur, puisque l’onde explosive, qui d’après cela caractériserait les explosifs, peut également dans certains cas assez fréquens se produire dans un grand nombre de poudres. Nous en verrons des exemples.

Ces corps se classent donc en pyrotechnie d’après la facilité avec laquelle ils peuvent prendre l’un ou l’autre des deux modes de décomposition. A une extrémité de l’échelle sont l’iodure d’azote ou le fulminate de mercure et les substances analogues auxquelles le frottement d’une barbe de plume suffit à communiquer le frémissement violent de l’onde explosive ; à l’autre sont l’ancienne poudre noire et les modernes poudres colloïdales, qu’on n’a jamais pu faire détoner par aucun choc, pas même par celui d’une soudaineté inouïe que produit le fulminate de mercure, qui pour ce motif sert aujourd’hui à faire les amorces généralement employées.

Entre ces deux extrêmes se placent les substances qui ont deux faces comme Janus et peuvent, suivant les cas, brûler simplement comme les poudres ou détoner comme les plus violens explosifs ; tels sont le fulmi-coton, l’acide picrique, la nitroglycérine et beaucoup d’autres composés à la fois nitriques et hydrocarbures.


On voit immédiatement d’après ce qui précède quels seront les emplois respectifs des poudres et des explosifs.

Dans un canon ou un fusil, le projectile est propulsé hors de la bouche à feu par la décomposition d’une substance qui doit être une poudre et non un explosif. Il est évident en effet que celui-ci produisant immédiatement une pression extrêmement élevée risquerait de faire éclater la pièce, et d’autre part, comme cette pression