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double rapport de l’importation et de l’exportation, en progrès constant. Les importations américaines s’étaient élevées de 484 millions de francs en 1902, à 874 millions de francs en 1912. D’autre part, les exportations françaises aux États-Unis avaient passé de 248 millions en 1902 à 424 millions en 1912. La France, seule parmi les grands États européens, avait eu ce privilège de doubler en une dizaine d’années le montant de ses transactions commerciales avec les États-Unis. D’ailleurs, les nations de l’Amérique du Sud ne devaient-elles pas se rendre à San Francisco ? Or, l’Amérique du Sud est le seul marché du monde où la France, partout ailleurs dépassée par ses rivaux, les distance à son tour depuis quelques années : son commerce, de un milliard 800 millions en 1905, s’avançait à 3 milliards 46 millions en 1912.

Plus encore que les motifs économiques, les raisons politiques invitaient la France à venir à San Francisco. La gloire commune de l’Indépendance, la participation américaine au Centenaire de 1789, le rôle, dans l’avance vers l’Ouest, des pionniers de l’ancienne France et des ingénieurs de la France moderne en qui les États-Unis, constructeurs du canal, en saluent l’architecte, la perspective de navigation ouverte par l’achèvement d’une telle œuvre aux lignes françaises, la présence, fidèle, à San Francisco, de 10 000 Français, tout ici conviait notre gouvernement à répondre à l’appel américain, sans plus permettre à son commerce de bouder ses intérêts qu’à la politique française, étonnée de la non-adhésion des États-Unis au protectorat marocain, de bouder son histoire.

Après avoir laissé vaguement annoncer l’envoi à San Francisco d’une flotte de guerre, commandée par le Kronprinz, l’Allemagne finissait, dans l’attente d’autres événemens, par s’abstenir définitivement ; l’Angleterre, représentée par ses colonies, décidait, comme métropole, de ne point paraître, Mais, suivant l’exemple de l’Amérique du Sud, du Danemark, de la Grèce, de la Norvège, de l’Italie, la France s’apprêtait à venir à San Francisco, laissant ainsi clairement voir à la République sœur qu’au-dessus de menues chicanes de commerce ou de politique, planait, conciliante et cordiale, une historique et durable amitié.

Puis la France attaquée dut se défendre. Debout, en armes pour la sauvegarde de sa substance patrimoniale et morale, elle