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vieux, qui semblaient jeunes : aèdes fatigués, ou démodés, et qu’on éconduira. Celui qui, dans la tempête, aura continué de chanter, de la même voix, seulement plus exaltée par sa véhémence, et dont la voix, dès aujourd’hui, s’accorde à l’immense clameur, celui-là aura fait le voyage périlleux et abordera sans dommage. Ainsi l’auteur de la Colline inspirée et de ces pages où les péripéties de la guerre ont leurs images pathétiques. Il n’a point eu à modifier sa manière. Le portrait de Charles Péguy, — « petit homme barbu, paysan sobre, poli, circonspect, défiant, doué du sens de l’amitié, bien campé sur la terre et toujours prêt à partir en plein ciel ; » — le portrait d’Albéric Magnard, — « chacun selon son pouvoir ! Joffre les chassera de France ; Albéric Magnard balaye le devant de sa maison ; — le sonneur d’angélus là-bas, vers les Vosges, — « c’est un confrère, cet homme obscur qui fait un si charmant bruit dans le noir ; que dit-il ce gazetier du ciel, ce journaliste dans les nuages ? il fait un bruit qui me relie avec mes premières années ; » — les paysages lorrains, « je connais ces nuages bas d’octobre, cette atmosphère ouatée, cette demi-obscurité dès les trois heures ; — l’automne en Lorraine, l’automne en France et dans les âmes, — « l’espérance flotte dans la brume d’automne, au-dessus des ruines ; » — ces poèmes en prose peinte et musicale ne feraient point de disparates dans les Déracinés, dans les Amitiés françaises et dans Colette Baudoche. Tout frémissant de la passion présente, l’art est le même ; il frémissait déjà et s’apprêtait à frémir davantage. Il est accordé à la vie de la France, dont il a médité l’infortune, rêvé la renaissance, aimé l’orgueil fidèle et dont il suivra les destinées, bientôt heureuses, désormais sublimes.


Après l’éloquence de M. de Mun et la poésie de M. Barrès, voici, avec les Commentaires de Polybe, et pour l’entretien des courages civils de la critique, de la stratégie, l’étude quotidienne des nouvelles et leur philosophie. Polybe l’ancien fut l’un des plus intelligens parmi les historiens de l’antiquité ; il excellait à débrouiller les événemens, à y démêler le hasard et l’efficacité des résolutions humaines ; il triomphait à diminuer la portion du hasard et à montrer, dans les meilleures réussites de la volonté, la récompense de la précaution. M. Joseph Reinach, Polybe du Figaro, n’a pas mal choisi son pseudonyme : et Polybe l’ancien ne désavouerait pas Polybe le jeune.

Au jour le jour, les communiqués officiels nous informent assez bien : les communiqués de chez nous, ceux d’Angleterre et de Belgique, ceux d’Italie et de Russie, ceux de Serbie et de Monténégro. Il