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contre-maîtres, ouvriers spécialistes, chirurgiens civils, radio-graphes, etc., sont désormais plus utiles dans l’exercice de leur spécialité que le fusil en main. Ce qui a été fait pour les employés des chemins de fer doit être imité pour dix autres métiers, où les hommes devraient, dès la déclaration de guerre, quel que soit leur âge, être mobilisés dans leur profession et affectés sans délai à un emploi tirant le meilleur parti de leurs capacités. Cela suppose l’établissement préalable d’un rôle de mobilisation concernant l’ensemble des industries auxiliaires de la défense nationale. Ayant omis cette précaution, on a été contraint de rechercher et de renvoyer à l’arrière, après beaucoup de temps perdu, les gens le plus évidemment nécessaires. On s’est efforcé de remplacer les autres. L’opération s’exécuta très imparfaitement, et les conséquences en pèsent encore sur nous. Il est par-là bien prouvé qu’en face des consommations de matériel qu’imposeront de plus en plus les guerres futures, on ne peut échapper à une extension du service obligatoire, englobant l’armement industriel des usines.

On ne s’en tiendra pas là. Quelque désir qu’on en ait, on se trouve obligé de lier à la guerre, d’une façon de plus en plus étroite, une foule d’actes de commerce. C’est par un intense courant d’importation que l’État entretient ses stocks de vivres et de matières premières. Il s’adresse, pour la plupart de ses commandes, à des entreprises privées, avec lesquelles il conclut, le plus souvent, des contrats à longue échéance. Il est de son intérêt de laisser à leur disposition les hommes dont elles ont besoin pour le servir. Les inscrits maritimes engagés pour la navigation commerciale n’ont pas été rappelés sous les drapeaux. L’Etat ne se contente pas de faciliter le recrutement du personnel, et, en cas de nécessité, de le fournir lui-même ; il assure par ses flottes de guerre, même hors des eaux nationales, la protection des bateaux de commerce. Après leur avoir fixé, avec ses commandes, le programme de leurs voyages et de leurs chargemens, il dicte aux armateurs les règles de sécurité à suivre pour échapper aux dangers. Il groupe les navires en convois, leur donne même, comme en Angleterre, des canons contre les sous-marins, etc. Il exerce sur les armateurs une tutelle d’autant plus minutieuse que leur matériel est un instrument plus précieux de son approvisionnement direct. D’ailleurs, beaucoup d’entre leurs navires sont réquisitionnés.