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XVIIe, contient une galerie de peinture, chose bien rare dans les Abruzzes. Nous y voyons quelques beaux tableaux de l’école de Crivelli et le fameux pluvial dit d’Ascoli, admirable < chape qui, jadis dérobée et vendue à feu Pierpont Morgan, fut généreusement restituée par lui à la ville d’Ascoli après des incidens retentissans.

Le lendemain nous suivons longtemps une route insignifiante sur le rivage de l’Adriatique, puis nous obliquons droit dans les terres. Nous escaladons un haut contrefort. Nous sommes à Atri, très ancienne ville d’origine étrusque, qui fut une des premières à frapper ces lourdes et énormes monnaies de bronze, le plus ancien numéraire italien connu sous le nom d’æs grave. Atri possède une merveilleuse cathédrale, dôme très antique avec une immense crypte et des fresques fameuses. C’est un des plus beaux monumens religieux des Abruzzes que nous visitons longuement. Nous faisons dans une petite auberge un déjeuner pittoresque. — La route qui nous mène d’Atri à Chieti est très mauvaise ; nous perdons du temps à franchir deux gués auprès de deux ponts rompus. Après un court arrêt à Pianella où une antique église fuori mura contient un extraordinaire ambon d’art très barbare, nous arrivons à Chieti par une longue et belle montée.

Chieti est une grande ville, une préfecture sans intérêt, mais dans une situation superbe sur une très haute colline. Son nom antique est Reate. L’ordre des Théatins qui y fut fondé par un de ses archevêques devenu plus tard le pape Paul IV, en a pris son nom. Du haut des promenades qui ont remplacé les vieilles murailles, la vue est splendide entre les massifs du Gran Sasso et la mer Adriatique qui scintille au loin.

Notre prochaine étape est une des plus longues. Nous nous arrêtons à Torre de Passeri où nous admirons dans une solitude fleurie les restes délicieux de la célèbre abbaye de San Clémente in Casauriade l’ordre de Cîteaux, un des plus insignes monumens du haut Moyen Age italien. L’ambon, la chaire à prêcher, la tribune, le chandelier pascal sont de toute beauté. De grands animaux, des aigles éployées, sculptés en haut relief, en décorent les parois. Un jardin rustique, ensoleillé, encercle admirablement ce site ravissant. — Nous repassons à Popoli, à Sulmona. Nous nous engageons derechef dans les plus hautes montagnes de l’Apennin et, par les plus tragiques défilés, nous