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pontonniers, etc. Pour apprécier, à sa juste valeur, l’effort accompli par le Département, il faut se rendre compte qu’il n’y était point préparé. Cette coopération de la Marine, dans les opérations à terre, n’avait pas été envisagée, et les cadres mêmes des unités nouvelles ont dû être improvisés. On a pris des officiers de marine de l’active, des officiers de réserve, des officiers des équipages de la flotte et des capitaines au long cours ; on les a réunis hâtivement et on leur a dit : « Débrouillez-vous pour barrer la route à l’ennemi. » Ils ont prouvé qu’on n’avait point en vain compté sur eux. Cependant, cette pénurie des cadres ne permit pas de pousser l’expérience plus loin, et, comme il restait encore dans les dépôts du personnel inutilisé, le ministère prescrivit de verser 4 000 matelots sans spécialité, puis 2 000 dans les régimens de l’armée de terre : infanterie de ligne, infanterie coloniale, zouaves, génie, etc. Ces 6 000 cols bleus ont endossé la capote et coiffé le képi pour se battre aussi vaillamment que leurs camarades de la brigade.

En même temps, le ministre décidait de ne plus appeler, pour son service, les inscrits maritimes âgés de plus de trente-cinq ans et l’ordre était donné de passer tous ces réservistes aux bureaux régionaux de recrutement. C’était l’application intégrale de l’article 2 de la loi du 8 août 1913. Cette décision mit à la disposition du Département de la Guerre 27 000 hommes environ[1] qui ajoutés aux 6 000 versés dans les régimens et aux 10 000 ou 12 000 marins des formations militaires donne le chiffre de 45 000 hommes, c’est-à-dire l’effectif d’un corps d’armée dont nous avons parlé au début de cette étude.

On pourrait regretter que le dégrossissement militaire de ce personnel ait été entrepris au cours des hostilités. Mais n’est-ce point-là le cas de tous les réservistes qui ont été reclassés dans les services armés ? D’ailleurs, les inscrits maritimes qui ont été incorporés dans les régimens d’infanterie coloniale, se sont révélés supérieurs, à classe égale, par leur endurance et leur sang-froid professionnel, à leurs camarades du recrutement. Ils ont été cités plusieurs fois dans nos communiqués comme s’étant particulièrement fait remarquer, notamment dans nos attaques de Champagne et de Beauséjour.

Malgré ces versemens successifs d’inscrits maritimes ; malgré

  1. Sur lesquels il en a été incorporé 26 000 environ, une grande partie ayant été depuis renvoyés en sursis d’appel.