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qui étaient dans la nécessité de vivre de leur travail. Il n’en reste pas moins cent soixante professeurs bénévoles dans nos lycées. Des hommes sont venus qui ont dit aux chefs de l’Université : « Je ne puis servir comme soldat, je veux servir mon pays de quelque façon. Employez-moi… » Et depuis deux ans, ils servent ainsi. Beaucoup de professeurs retraités (126) sont remontés dans leur chaire, quelquefois rajeunis par la joie d’être utiles ; plusieurs refusent d’être rétribués. Le traitement d’un professeur se compose d’ordinaire de deux parties, d’ailleurs inégales : le traitement proprement dit et la rémunération d’heures d’enseignement données au-delà du nombre qui est dû. Ces heures supplémentaires continuent d’être données, mais elles ont cessé d’être payées. Chaque semaine, il y en a plus de 1 350 faites dans ces conditions, sans compter celles qui sont faites, — aux mêmes conditions, — par les professeurs de faculté, les proviseurs et les censeurs (350). Aux professeurs des régions envahies on offrit, dans d’autres lycées que les leurs, une occupation pour eux le plus souvent salutaire. Force fut cependant de nommer des suppléans et aussi des suppléantes. Il y a, à l’heure présente, quatre cent cinquante femmes environ enseignant dans les lycées et collèges de garçons ; il y en a trois dans les facultés mêmes. On se demandait à quoi pourraient bien servir ces jeunes filles qui, depuis quelques années, envahissaient nos facultés des lettres et des sciences, et que les cadres de l’enseignement féminin ne devaient certainement pas suffire à recueillir. L’imprévu est arrivé, et ce que l’on se demande aujourd’hui, c’est comment on aurait pu se passer d’elles. Enfin, surtout dans cette seconde année de guerre, il y a eu des professeurs en uniforme ; ils sont trois cents dans tous les ordres d’enseignement. Une entente entre le ministère de la Guerre et le ministère de l’Instruction publique a, permis en effet la conciliation de certaines besognes militaires et de la besogne universitaire. Ces professeurs en uniforme font double service, mais ne sont pas les moins écoutés de leurs élèves.

Il y a une catégorie, peu nombreuse il est vrai, de professeurs, dont nous n’avons pas encore parlé : les professeurs belges. Nos lycées s’étaient ouverts aux élèves belges qui y avaient été reçus, lorsqu’il le fallut, gratuitement, comme y sont reçues les victimes françaises de la guerre pour lesquelles le régime trop étroit et trop parcimonieux des bourses ne