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insurrections; en Chine pour occuper le Japon, aux Indes néerlandaises on ne sait pas pourquoi.

Pour nous, notre situation est bonne. Avec l’espace et le temps, qui étaient de notre côté, la grande partie que nous jouons ne pouvait guère être perdue. Mais il s’agissait de faire ce qu’il faut pour la gagner, et la gagner n’est pas la même chose que ne pas la perdre. Nous y avons mis près de deux ans, mais c’est fait. Les Allemands se vantent à tort d’avoir inventé l’organisation. Ils nous ont emprunté, — comme ils empruntent, — le terme même. On s’en servait chez nous depuis un quart de siècle quand ils l’ont employé pour la première fois. Qu’ils prétendent l’accaparer, n’empêche nullement que l’organisation, si c’est l’ordre, ne soit une vertu française, clarté dans la pensée, justesse dans l’exécution. Potsdam n’a fait que s’aligner sur Versailles ; mais les alignemens de Versailles, l’ordre français, viennent du fond de l’histoire et des origines de la race. Par rapport à ce fond permanent, toutes nos révolutions ont été de surface. Plus que personne, et depuis plus longtemps que personne, nous avons l’unité, qui est la condition de l’ordre. Nous pouvions donc, et nous devions donc avoir l’ordre, qui est la condition de la victoire.

Nous l’avons maintenant en son plein, étendu de nous à nos alliés et de nos alliés à nous, se déroulant synchroniquement et systématiquement dans le temps et dans l’espace. A aucun prix, sous aucun prétexte, et même pour aucune raison, s’il en était, il ne faut le compromettre. Cette idée nous poursuit et nous assiège, à propos de la réunion du Sénat en Comité secret après le Comité secret du Palais-Bourbon (du moins n’ont-ils pas mal fini), à propos aussi du projet, qui rencontre faveur à la Chambre, d’instituer une délégation aux armées. Nous ne sommes pas ici, et nous ne laisserons pas échapper une occasion d’en faire souvenir, des adversaires du régime représentatif. Nous ne croyons pas qu’il fût possible, ni qu’il fût désirable, de supprimer purement et simplement toute vie parlementaire pendant la durée de la guerre. Nous accorderions volontiers que la guerre moderne, une guerre industrielle, quasi universelle et qui se prolonge comme celle-ci, en tendant à l’extrême tous les ressorts de la nation, veut, pour se soutenir, la coopération de tous, et premièrement des représentans de la nation. Nous inclinerions, de plus, à penser que, si tant d’activités se démènent, c’est que trop de bonnes volontés ont été, et sont peut-être encore, inutilisées : là aussi, il y avait eu défaut de coordination, et, pour tout dire, défaillance du gouvernement. Mais pas d’excès, pas de confusion; chacun à sa place, dans le cadre de