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outre leurs prix, — et des gâteaux, — fut remise cette attestation :


L’élève X…, par son travail et par son assiduité à suivre les cours, malgré le danger et la difficulté des circonstances, a mérité cette récompense.

Dans une cave de Champagne.

Le 332e jour du bombardement.

31 juillet 1915.


DANS LES RÉGIONS ENVAHIES

Et, au-delà de la ligne de feu, que deviennent maîtres et élèves ? Nous ne savons pas tout, et nous ne pouvons dire tout ce que nous savons. Nous savons qu’on travaille. Un vieil instituteur de l’Aisne, qui a dû à son âge d’être évacué ensuite par les Allemands, nous a raconté comment il rouvrit son école en octobre 1914, le nettoyage énergique qu’avec des moyens de fortune il lui fit lui-même subir (car elle avait servi à tout), puis l’arrivée successive des élèves « qui ne voulaient pas d’abord y croire. » Le difficile fut d’avoir des plumes. On retrouva heureusement les plumes usagées dans la boite à craie, où les élèves les déposaient chaque lundi, en échange d’une neuve. On était de bonne garde dans cette école ; et, quand les plumes usagées elles-mêmes vinrent à manquer, ce fut le triomphe du procédé La Martinière. Cette bonne volonté, luttant pied à pied contre les difficultés matérielles, fut l’histoire commune. Des instituteurs allemands demandent à assister à la classe. Ils s’étonnent de ne jamais voir battre les élèves, et cet étonnement fait plaisir. Ceux-ci travaillent bien, et une des tristesses que la prolongation de la guerre apporte à l’instituteur, c’est qu’il ne jouira pas de leurs succès au certificat. Les Allemands, autour de lui, chantent victoire ; mais l’instituteur en croit plutôt le bruit du canon qui ne s’éloigne pas, et il en est à désirer de l’entendre. « Voix du canon, voix de l’espoir, » dit-il stoïquement. Cette persistance de l’amour-propre professionnel et des espérances patriotiques, c’est encore l’histoire commune.

L’organisme plus compliqué d’un lycée ou d’un collège est plus difficile à faire vivre, et surtout à faire revivre. On y a réussi presque partout cependant. Un lycée est administré directement par les Allemands, destiné sans doute par eux aux fils de