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avait attaqué, on se souvient comment. Quatre-vingt-treize savans, c’est-à-dire quatre-vingt-treize témoins de la vérité avaient accepté de mentir pour leur patrie. Les universités françaises et les différentes Académies répondirent. Du manifeste des universités françaises, dont les phrases martelées et pressantes semblent avoir été écrites pour le bronze, il n’est que juste de rapprocher la réponse faite par les instituteurs français à leurs collègues allemands. Ceux-ci avaient tenu ce raisonnement : on sait ce que nous valons comme instituteurs ; il n’est pas vraisemblable qu’une armée sortie de nos écoles ait commis des atrocités. Les instituteurs français répondirent : cela n’est pas vraisemblable, en effet ; mais cela est, et vous discutez sur ce qui est vraisemblable, parce que vous n’osez discuter sur ce qui est. Il faut dire, malgré ces joutes brillantes et quelques articles retentissans, que la propagande française fut pendant longtemps d’une extrême discrétion. N’avions-nous pas notre bon droit qui parlait pour nous ? Et les esprits les plus nobles parmi les neutres ne furent pas insensibles à la dignité de notre silence. Mais, quand il apparut que la guerre devait durer, quand on comprit que la séduction exercée sur les neutres faisait partie du plan de campagne de l’ennemi, il y eût eu quelque naïveté à prolonger ce silence.

Dès septembre 1914, deux professeurs impatiens d’être utiles à leur pays, MM. Rébelliau et Lévy-Brühl, conçurent le projet d’un journal en plusieurs langues. L’Alliance française facilita la réalisation de ce projet, en mettant à leur disposition ses moyens d’action, ses locaux, ses correspondans, son Bulletin même qui devint le Bulletin de guerre de l’Alliance française. Le premier numéro paraissait le 1er novembre 1914, en français et en espagnol. Cinq mois après sa fondation, le Bulletin paraissait en neuf langues et atteignait 70 000 lecteurs. Il parait aujourd’hui en dix langues : français, allemand, anglais, danois, espagnol, grec, hollandais, italien, portugais, suédois, et touche 200 000 lecteurs. D’autres universitaires, sous le nom d’Études et documens sur la guerre, publièrent des brochures dont nous ne citerons pas les litres, parce qu’ils sont connus de tous, et dont quelques-unes eurent le don d’exaspérer l’ennemi. D’autres séries de brochures suivirent, celles de la Bibliothèque d’histoire contemporaine, celles de la Revue hebdomadaire, etc. Mgr Baudrillart, à la Société" des conférences, a