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avions de guerre des adversaires si redoutables pour l’ennemi, des auxiliaires si précieux dans les mains de notre commandement. L’heure n’est point venue encore d’entrer à cet égard dans des détails. Aussi sans aborder aucune des choses qui doivent rester secrètes, vais-je seulement ici indiquer quelques particularités et quelques méthodes des aéroplanes militaires qui sont bien connues de nos ennemis, et appliquées par eux-mêmes comme par nous, ainsi qu’il résulte de leurs publications et de l’examen de leurs appareils tombés entre nos mains. Même ainsi limité, ce rapide examen suffira, j’en suis convaincu, à montrer l’intelligente hardiesse, l’habileté technique, la science que doit posséder aujourd’hui un aviateur militaire digne de ce nom… et nous en avons des légions dans ce cas.


L’avion de reconnaissance, l’avion éclaireur, est destiné à explorer le secteur ennemi, les positions et les mouvemens des troupes adverses, à découvrir leurs dépôts de matériel, à définir exactement avant une attaque et pendant celle-ci l’état et la position de leurs retranchemens. En un mot, il est le regard perpétuellement mobile du commandement, sans cesse braqué comme un dard mortel sur l’ennemi.

Dans les guerres anciennes, c’était la cavalerie qui était chargée de ce service de reconnaissance. La guerre immobile de tranchées qui sévit actuellement a réduit ses chevaux à l’état de comparses encombrans. Mais même au début de cette guerre, quand les troupes opéraient de vastes mouvemens stratégiques, le rôle des cavaliers éclaireurs a été infiniment moins utile que celui des avions, car le cavalier ne peut voir que des détails, l’avion voit les grandes lignes, les dominantes d’un champ de bataille et d’une armée en marche, parce qu’il plane, parce qu’il voit les choses d’assez haut pour que les détails sans importance ne lui masquent pas les choses essentielles. Si la bataille de la Marne a pu s’engager victorieusement, c’est en grande partie- parce que les rapports de nos pilotes ont signalé une large fissure entre deux des armées envahissantes.

Depuis lors, le rôle des éclaireurs aériens n’a fait que se développer des deux côtés de la barricade. Ce sont généralement des appareils biplaces montés par le pilote qui ne s’occupe que de la conduite de sa machine et par un officier observateur qui est tout à sa besogne de reconnaissance. Celle-ci était faite naguère uniquement à l’œil nu ou à la jumelle ; aujourd’hui on tend à remplacer cette documentation