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vu leurs blesses tirer sur des infirmiers[1]. Il suffit, pour montrer l’inanité de ces accusations, de rappeler que ce dernier fait, — tirer sur des infirmiers, — a été dûment constaté, mais à la charge des Allemands et des Allemands eux seuls. Une autre accusation se réfute par son absurdité, bien qu’un général n’ait pas dédaigné de la prendre à son compte : c’est celle qui représente les soldats et même les officiers de l’armée adverse comme portant dans leur sac un costume civil complet, destiné à favoriser leur fuite s’ils étaient serrés de trop près[2].

Une critique plus justifiée peut-être s’attache aux uniformes surannés et voyans qui, au début de la campagne, les désignaient aux coups ennemis : « On a peine, écrit dédaigneusement un soldat, à appeler uniforme ce qu’ils portent ! » — « Comment se peut-il, déclare un autre, qu’à l’heure actuelle un peuple consente à se laisser mener au combat en pantalons rouges ou noirs et en capotes d’un bleu éclatant[3] ? » Enfin l’argument favori de tous ceux qui n’en trouvent pas d’autre contre l’adversaire, c’est la description des convois de prisonniers. Des hommes harassés par le combat, déprimés par la fatigue, souvent démoralisés par la captivité, peuvent facilement laisser une impression défavorable. Il n’est pas nécessaire de forcer beaucoup la note pour les représenter comme un troupeau pitoyable, composé de malingres « insuffisamment nourris » (gros grief ! ) et parmi lesquels on aurait peine à trouver une de ces figures qui font dire aux Allemands : « Voilà vraiment de beaux types humains ! » Mais ce ne sont là encore que des remarques tout extérieures, plus significatives pour la psychologie de ceux qui les formulent que pour la valeur réelle de ceux qui en sont l’objet.

A l’égard des Anglais, les Allemands se plairaient visiblement à conserver cette attitude d’indifférence dédaigneuse qu’a symbolisée la phrase célèbre de leur Empereur sur la contemptible army du général French. L’épreuve était au-dessus de leurs forces et l’impassibilité de commande qu’ils affectaient au [4]

  1. Von Moser, pp. 36, 37 ; Der deutsche Krieg in Feldpostnriefen, I, p. 117. Thümmler, I, p. 15, II, p. 12, III, p. 20, VI, p. 10, VIII, p. 9, IX, p. 14, XXIV, p. 23.
  2. Von Moser, p. 22. Cf. Kutscher, p. 77, Unser Vormasch bis zur Marne, p. 37
  3. Thümmler, VI, pp. 13-14 ; Wiese, p. 96.
  4. Ganghofer, pp. 69-70 ; Thümmler, 1, pp. 14-15, II, pp. 30-31, et XXMI. p. 12.