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ferme lentement les portes du temple de Janus et elle ouvre plus lentement encore celles du temple de La Haye.


II. — DE L’ARMISTICE, POINT DE DÉPART DE TOUTE NÉGOCIATION

Nous voici donc en présence du premier acte commençant l’évolution de la guerre à la paix : c’est l’armistice. L’armistice, c’est-à-dire la suspension des hostilités entre toutes les armées ennemies, sera, comme d’ordinaire, le préliminaire indispensable.

L’armistice est essentiellement l’œuvre des militaires. Seuls les grands chefs peuvent savoir quelles garanties il faut obtenir de l’ennemi pour que leurs troupes ne soient pas exposées à un retour où la victoire serait surprise dans sa confiance et sa bonne foi. Un des graves inconvéniens de la formule du « chiffon de papier, » c’est qu’elle rendra, dans la crise actuelle, les premiers contacts particulièrement difficiles. Qui voudrait s’en fier à la parole de celui qui l’a prononcée ? D’ailleurs, il n’y a pas de parole ni de signature qui compte à ces heures-là : il faut des faits ; et, ces faits, qui peut les obtenir et les déclarer satisfaisans, sinon ceux qui auront la responsabilité des conséquences ?

Songez aux terribles effets de la moindre erreur en ces matières. La guerre actuelle a réuni sur les champs de bataille « les nations armées ; » il ne doit être question de leur faire entrevoir une première détente, si l’on n’a pas obtenu d’abord, de l’ennemi, des concessions réelles mettant celui-ci dans l’impossibilité de reprendre les armes. Ces précautions sont indispensables et elles devront être calculées avec une exactitude et une vigilance rigoureuses : car, c’est en ce point précis qu’est le gond ou la charnière qui fera tourner la guerre vers la paix. La moindre surprise pourrait être fatale : nous avons affaire à une coalition qui est pleine de Sawof.

L’armistice doit être dicté par les militaires et être signé par eux sous leur responsabilité. A eux de prendre leurs précautions.

Ces précautions, d’ordinaire, sont les suivantes : le désarmement de l’ennemi, l’occupation de certaines places fortes ou de certains territoires, le sacrifice immédiat de certaines ressources et avantages qui pourraient permettre à l’ennemi de