Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 36.djvu/254

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

deux jours, arrive à Dombasle dans la nuit du 21 au 22 août. Elle a fait une marche de 50 kilomètres. On ne la laisse pas reposer. Soutenue par deux groupes de 75 et deux groupes d’artillerie lourde, elle franchit la Meurthe et occupe les hauteurs de Flainval. L’ennemi fait un effort pour lui passer sur le corps ; mais elle tient toute la journée du 22 et, empêchant ainsi l’ennemi de tourner le Grand-Couronné vers le Sud, maintient ses liaisons avec le 16e corps. Le soir venu, la mission est remplie, la 22e brigade se décroche des Allemands sans être inquiétée. L’ennemi perd le contact. Les Français repassent la Meurthe et font sauter les ponts derrière eux.

Quelques semaines plus tard, le 16 octobre, le général de Castelnau se portait lui-même à l’état-major de la division et citait à l’ordre du jour le général Ferry, « pour avoir deux fois rétabli la situation en Lorraine, à Flainval et à Champenoux-Réméréville et avoir, par son organisation et son activité, réussi à maintenir en face de lui des forces trois fois supérieures aux siennes. »

Sur le Rembétant, la journée n’avait pas été mauvaise non plus :


Après avoir passé une nuit sur des paillasses (4e bataillon de chasseurs, à Saint-Nicolas-du-Port), nuit qui nous fit bien du bien, chacun s’empresse de se laver un peu, on en a grand besoin, et de courir voir tous les blessés de la 11e division qui sont soignés ici, le quartier ayant été transformé en hôpital. C’est une cohue invraisemblable : chacun va et vient de tous côtés.

8 heures du matin. — Branle-bas général, le clairon vient de sonner le rassemblement et pas gymnastique ! Quoi ! les Boches seraient-ils déjà là ? Les marsouins auraient-ils lâché ?… Non ! C’est tout simplement pour être prêts. Néanmoins, une demi-heure plus tard, on retraverse la Meurthe et l’on voit arriver des paysans qui s’enfuient de leurs villages.

On grimpe au Remnbétant où l’on retrouve les marsouins. Le temps est superbe. Il règne partout une activité fébrile. Tout à coup, semblable à un orage qui éclate, voilà notre artillerie qui ouvre le feu ! 120 et 75 rivalisent à qui jettera le plus vite et le plus terriblement possible la mort dans les rangs adverses. Je crois qu’ils prennent quelque chose ! La canonnade cesse, et une furia des marsouins se fait entendre, sans donner le temps de réfléchir aux Boches, qui sont cloués sur place. On a hâte d’y aller pour se venger d’avant-hier. En tout cas, on jouit du coup d’œil. Les Boches contre-attaquent… Peine perdue. Messire l’6 rouvre la danse et aussitôt tout s’arrête[1].

  1. Carnet de route inédit du caporal Cazeneuve.