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entre la 1re et la 2e armée. Le corps de cavalerie a, malgré tout, conservé ses positions : les forces allemandes ont mis une journée entière pour faire 5 kilomètres. Pendant ce temps, le 8e corps avait reçu, à midi 30, l’ordre de s’engager sur Vennezey-Moriviller, soutenu par le 13e corps, dont l’aile droite s’appuyait solidement à Ménarmont. L’artillerie de Belchamps (artillerie lourde du 16e corps) qui commande la route de Lunéville à Bayon donne énergiquement :


24 août. — Les colonnes ennemies viennent de partout : de Damelevières, de Mont, de Lunéville. Elles se réunissent autour de la fameuse route de Lunéville à Bayon, coupée par nos positions défensives. Nos postes avancés se replient devant cette marée. Des deux côtés de la route, du bois de Vacquenat et du bois de Clairlieu, débouchent compagnies après compagnies, régimens après régimens. En même temps, le bombardement commence. Les obus et les shrapnells pleuvent sur le plateau. De la ferme Léomont à Belchamps, sur plus de 2 kilomètres, le sol est labouré comme par une gigantesque charrue.

A partir de 1 heure de l’après-midi, sous un ardent soleil, nos batteries ouvrent le feu. Un feu d’enfer. Elles ont tiré tout l’après-midi et toute la nuit. Les Allemands se sont tus ; une seule rafale énorme, le soir. Quand ils auront cédé, nous verrons les effets de ce tir. Sur les deux routes où s’avançaient leurs colonnes, de cinquante en cinquante mètres, à droite et à gauche, il y a les trous de nos Rimailhos et de nos 75. Rien n’a dû survivre de ce qui passait sur ces routes. L’après-midi, nous n’avons pas fait grand’chose. Un général de brigade a vu un mouvement de troupes sur le plateau qui domine la Meurthe. Il nous y envoie plein d’anxiété. L’escadron part au grand trot. Mais le général Bigot (commandant la 74e division de réserve) qu’on rencontre, arrête le capitaine et nous renvoie sur nos pas. Ce sont des régimens du 15e corps qui ont été pris pour l’ennemi[1].


Voici, d’après un récit allemand, un épisode du combat du 24 août au Sud de Lunéville :


Arrivés à Lunéville à minuit et demie, nous partîmes à 5 heures du matin pour nous établir sur les positions. Nous demeurâmes de 7 heures du matin à 1 heure après-midi en ligne de tirailleurs avec les réserves nécessaires, mais nous ne pûmes pas tenir à cause du feu de l’artillerie ennemie. Les Français employaient de lourds obus de marine et nous nous retirâmes sur la gauche. On s’installa dans une sorte d’entonnoir, que notre régiment appelle depuis « la bouilloire de la sorcière, » où nous étions tous en « gruppeukolunnen ; » bientôt un aviateur français nous survola, - décrivit un cercle, et, dix minutes plus tard, les obus nous

  1. La Victoire de Lorraine, loc. cit., p. 17.