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tempête métallique a quelque chose d’attristant. Mais puisque nous ne pouvons nous y soustraire, elle aura du moins cet avantage qu’en la poussant à notre profit jusqu’à ses dernières limites où nous n’aurons plus de contact avec le Boche que par les terribles rallonges de l’acier, qu’en y conquérant à notre tour la maîtrise, nous pourrons enfin, grâce à elle, épargner le précieux sang de France.

Pour citer quelques exemples connus des portées obtenues avec les canons lourds, il me suffira d’indiquer que notre vieux 155 installé sur des affûts modernes et notre bon 105 à tir rapide tirent couramment jusqu’à 13 kilomètres ; notre ancien canon de 14 centimètres peut dépasser 16 kilomètres, notre canon de 32 centimètres atteint une vingtaine de kilomètres ; quant à nos grands canons de bord, devenus terriens grâce à d’ingénieux affûts, le 305 atteint facilement 20 kilomètres, le 340 peut porter jusqu’à plus de 32 kilomètres, c’est-à-dire presque aussi loin que les canons allemands de 380 qui ont bombardé Dunkerque. Nous avons d’autres types excellens de canons lourds dont on me saura gré de ne pas parler ici. Ce ne sont pas les modèles excellens qui nous manquent ; l’important est d’en multiplier les exemplaires.

Tous ces canons lourds, dont beaucoup sont munis de reculs sur l’affût, sont devenus relativement très mobiles, grâce à d’ingénieux dispositifs, soit qu’on les déplace par tracteurs (A L T, ce qui veut dire : artillerie lourde à tracteurs), ou sur voie ferrée (A L V F), ou seulement attelés (A L A) de chevaux qui sont encore, chaque fois qu’il est possible, le plus souple des tracteurs. Qu’on la classe en artillerie lourde de campagne (A L C), en artillerie lourde de position (A L P), en artillerie lourde à grande puissance (A L G P), il nous suffira de savoir que, par un vigoureux coup de reins, nous sommes en passe de dominer bientôt l’ennemi dans la qualité, sinon encore la quantité totale de nos canons lourds. Les caractéristiques de chaque type importent peu, notre but étant ici non d’une nomenclature technique sans intérêt, mais d’une vue d’ensemble de la question : il n’est pas nécessaire, pour bien comprendre les grandes théories transformistes, de connaître en détail toutes les espèces de phanérogames, de même que réciproquement, hélas ! les minutieuses notions de détail ne suppléent pas toujours à une claire vision panoramique des phénomènes. Si