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qu’à couler le malheureux vapeur pour nous priver du reste de sa cargaison.

Que font-ils des équipages, me demandera-t-on, dans ces vastes espaces de mer, où ce serait dérision d’en confier le salut à quelques misérables canots ? Il est douteux qu’une telle préoccupation arrête jamais un commandant de submersible à qui ses instructions prescrivent la guerre sans merci. Cependant il y a déjà des exemples de la mise en jeu d’une solution intéressante de ce douloureux problème. Opérant dans des parages peu fréquentés par ses adversaires, le grand submersible navigue tranquillement en surface, — ce qui, au demeurant, lui économise du combustible, — en se faisant suivre du premier paquebot qu’il a capturé et vidé de sa cargaison. C’est ce bâtiment qui recevra les équipages, moins les capitaines, des vapeurs que leur mauvaise fortune fera tomber entre ses mains., Inutile de dire qu’un traitement si doux ne s’applique pas aux navires des belligérans, qui sont presque toujours coulés sans avertissement préalable et dont le personnel, ou ce qu’il en reste, est abandonné à ses propres ressources.

Résumons nos réflexions sur ce cas en disant que les croisières des Alliés devront être singulièrement renforcées dans les eaux de l’Atlantique Ouest et de la mer des Antilles, s’ils prétendent conserver à leurs lignes de communications le bénéfice de quelque sécurité. Mais, dans quelle mesure, renforcées ? Et la limite du possible ne sera-t-elle pas bientôt atteinte, surtout après que trente mois de guerre auront fatigué tant de croiseurs et ruiné leurs chaudières ? Grave question encore que celle-ci !…


Passons dans la Méditerranée, qui est assurément le théâtre d’opérations maritimes qui nous intéresse le plus, nous, Français. Le caractère essentiel de cette mer, particulièrement sur la très importante ligne de communications Marseille-Salonique, est celui de plans d’eau successifs relativement resserrés et que viennent étrangler, de distance en distance, des bras de mer tout à fait favorables aux embuscades de sous-marins.

De plus, ceux-ci trouvent, à peu de distance au Nord du milieu de la ligne Marseille-Salonique, une précieuse base d’opérations parfaitement installée, — Cattaro, — sans parler de plusieurs stations dans l’archipel Dalmate et enfin du grand arsenal de Pola, à la pointe de l’Istrie.