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groupes et, toujours chantant et précédés d’un accordéon, ils se dirigeaient vers les tchaïnaïas où un verre de thé leur était servi. Sur le front, — et je puis l’affirmer pour l’avoir vu ! — les soldats ne pensent pas plus à l’alcool que s’ils n’en avaient jamais bu. Si l’on y fait allusion, ils lèvent les épaules avec un air de profonde indifférence.

— La vodka ? On ne sait même pas pourquoi on en buvait. Peut-être pour faire passer le temps. Ici, il y a les Allemands qui nous empêchent de trouver le temps long ; et l’on a bien autre chose à faire qu’à boire…

— J’ai vu sur le front des soldats ivres, m’a dit Son Excellence le général Adamovitch, mais c’étaient des Allemands que nous avions faits prisonniers sous les murs de Lodz.

Les chefs sont enchantés et pleins de gratitude pour l’Empereur, qui, par cette mesure, a rendu la discipline plus facile, et plus étroites et plus cordiales les relations entre l’officier et le soldat.

— Nous ne sommes pas malheureux, me dit encore le général Adamovitch, même quand nous n’avons pas de vin ou de vodka à donner à nos hommes au moment du combat, car nous n’avons jamais eu besoin de les stimuler par l’alcool pour les lancer à l’attaque. Leur bravoure a toujours suffi.

C’est sur cette parole tant de fois justifiée que je terminerai le résumé de mon enquête. Je sais combien la lutte est chaude chez nous autour de la suppression de l’alcool. Je serais heureuse si l’exemple de nos Alliés, que j’ai tâché de montrer sous toutes ses faces, aidait la France à triompher du monstre.


MARYLIE MARKOVITCH.