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initiative, qui économisent mais ne risquent rien. » Quant à l’ouvrier français, il a cru trop souvent, sous l’influence de certaines doctrines, aux avantages à attendre de la raréfaction de la main-d’œuvre, comme si l’affaiblissement des industries où il travaille pouvait lui apporter des avantages durables.


Nous ne pouvons croire qu’il soit impossible de lutter contre le mal qui nous ronge. Plusieurs, n’osant peut-être pas envisager la question en face, se préoccupent seulement de la diminution de la mortalité. Certes, de grands efforts sont encore à faire dans ce sens, et la science, notamment dans la voie ouverte par Pasteur, remportera encore d’éclatans triomphes. L’hygiène fait aussi d’admirables progrès, et une loi, comme celle que la reconnaissance publique dénomme loi Roussel, a contribué à la diminution de la mortalité infantile. Ne nous faisons pas cependant trop d’illusions de ce côté. On est a priori tenté de penser que la diminution de la mortalité amène nécessairement l’accroissement de la population. Les statistiques de M. Bertillon établissent que les choses sont plus complexes. La comparaison de la mortalité et de la natalité montre que, dans la plupart des pays, la natalité est faible ou forte, suivant que la mortalité est elle-même faible ou forte.

Il y a une cause de dépopulation, criminelle celle-là, qu’il faut flétrir et poursuivre sans pitié : ce sont les manœuvres abortives. Sans insister, disons seulement que ce mal a pris les proportions d’un fléau social ; il croît avec une telle intensité qu’on se demande si l’énormité du scandale ne suspend pas l’arme de la justice. Il en est de même pour des propagandes recommandant certaines pratiques auxquelles on rattache bien à tort le nom d’un respectable pasteur anglais. Contre ces propagandes la puissance publique n’est pas désarmée ; elle manque à son devoir quand elle n’agit pas. Si la loi doit être renforcée, que le législateur y pourvoie au plus vite. Je crois inutile de parler une fois encore de l’alcoolisme. Tout a été dit, vainement hélas ! sur l’alcool qui, à la fois, augmente la mortalité et diminue la natalité, poison protégé par des tabous qui n’ont rien de mystérieux et dont l’usage devrait être complètement interdit.

Mais il ne faut pas se bercer d’un chimérique espoir.