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auxquels elle peut s’associer ou dont elle peut dépendre. Le sentiment, la parole est du nombre. Et la politique aussi, paraît-il, et jusqu’à la forme du gouvernement. « Des institutions politiques considérées dans leurs rapports avec l’art musical. » C’est le titre d’une partie des Essais, qui n’est pas la meilleure. Elle débute ainsi : « La liberté est l’apanage de l’homme. En le formant, le Créateur lui dit : « Sois libre. » Et il le fut. « Vous reconnaissez la doctrine de Jean-Jacques et son erreur funeste. La suite, à peu de chose près, n’est pas plus raisonnable, ne consistant que dans l’étalage, en style de l’époque, de toute une esthétique républicaine ou révolutionnaire. L’auteur assure que « dans les monarchies, chaque intrigant peut tout envahir parce que tout est du ressort de l’intrigue. Il n’est pas nécessaire à l’intrigant d’avoir la moindre notion des arts pour être mis à leur tête… Dans un gouvernement démocratique, chaque artiste à les mêmes droits aux récompenses publiques ; mais il n’y a en général que les vrais talens qui osent se mettre en évidence pour occuper les places qu’ils sont seuls en état de remplir. Si l’artiste ignorant et toujours ambitieux emploie l’intrigue pour faire solliciter les magistrats, ceux-ci, effrayés d’une responsabilité qui circonscrit toutes leurs actions, le repoussent pour s’étayer de l’opinion publique, qui proclame d’avance, dans chaque partie des arts, l’homme qu’elle a distingué depuis longtemps. »

Faut-il croire que, pendant quelque vingt ans de gouvernement monarchique, Grétry lui-même, Grétry le premier, n’avait « tout envahi, » — je veux dire la scène française, et royale, — que par le « ressort de l’intrigue, » et non par la force, ou la grâce, de son charmant génie ! Un peu plus loin, quand il appelle de ses vœux « le temps où nos spectacles feront la peinture des mœurs pures des républicains français, » où l’on exécutera sur un de nos théâtres « la musique des Pergolèse, Haendel, Buranello, Jomelli, Lulli, Rameau, etc., » il est permis de se demander ce que Grétry pouvait bien trouver de commun entre cette musique et ces musiciens, et la République française.

Celle-ci, d’après Grétry, devait fournir à la musique, non seulement des idées, ou des sujets, mais des paroles même. Et lesquelles ! « A l’exemple des anciens, on peut mettre en musique les Droits de l’homme et du citoyen ; nous devons y ajouter les devoirs particuliers de mère et de citoyenne. Je pense que